Rapport de conjoncture 2019

Section 04 Atomes et molecules – optique et lasers – plasmas chauds

Composition de la Section

Laurence Pruvost (présidente de Section), Hinrich Lutjens (secrétaire scientifique), Lionel Amiaud, Bernadette Bergeret, Jean-Claude Bernard, Ludovic Biennier, Thomas Bourdel, Marc Brunel, Annette Calisti, Florent Calvo, Patrice Camy, Charles Desfrançois, Alicia Domaracka-Rousseau, Stéphane Faure, Mario Gattobigio, Christine Grauby-Heywang, Saida Guellati-Khelifa, Nadine Halberstadt, Lionel Poisson, Stéphane Sebban, Abdelmadjid Taki.

Résumé

Le cœur de métier de la section 04 est la physique fondamentale de la matière diluée, l’optique, les lasers et les plasmas chauds. Il repose sur des expériences de pointe aussi bien de coin de table que sur de grands instruments et des approches théoriques et numériques des plus performantes. Des avancées majeures ont été réalisées dans plusieurs domaines : lasers ultra-courts et leurs applications, physique quantique reliant désormais l’atome unique à la matière condensée, extension des atomes ultra-froids à de nouvelles espèces et applications, nouveaux records en métrologie des fréquences et redéfinition des unités, premiers signaux d’ondes gravitationnelles, sources et protocoles d’optique quantique formant un des socles des technologies quantiques, développement des lasers ultra-puissants pour l’interaction lumière-matière en conditions extrêmes, et enfin dynamique des plasmas de fusion et interaction plasma-surface qui contribuent ensemble à l’avancée des ambitieux projets LMJ et ITER. Ces recherches ont reçu des reconnaissances prestigieuses dont le prix Nobel de physique de 2018, ainsi que des financements conséquents, ouvrant la voie à des innovations sociétales via brevets, partenariats et entreprises.

Introduction

Les thématiques de la section 04 concernent les processus impliquant des objets « simples » allant de l’atome, la molécule jusqu’à l’agrégat ou la molécule impliquée dans des systèmes vivants. Ces objets sont placés en milieux dilués mais aussi près de surfaces, en matrices cristallines ou dans des environnements biologiques. Les recherches visent à comprendre ces objets en soi, leur évolution, leur réactivité, les interactions entre eux mais aussi avec des champs extérieurs. Elles s’appuient sur des techniques très diverses couvrant des sources de particules elles- mêmes variées (froides, chaudes, en jets, en sprays, etc.), des sources optiques tout aussi variées (lasers continus, en impulsions ou sources issues de grands équipements), des méthodologies de plus en élaborées (spectroscopies, temps de vol, imagerie super-résolue) et souvent combinées entre elles. Ces techniques sont elles-mêmes au centre de nombreuses recherches afin de les rendre de plus en plus performantes, de les adapter aux objets d’étude et d’en faire des plateformes de recherches. Les développements instrumentaux et expérimentaux couvrent une diversité grandissante d’échelles de temps et d’espace. Ils sont par ailleurs confortés par des approches théoriques et numériques créatives et de haut niveau, empruntant souvent l’expertise de disciplines voisines en physique de la matière condensée, en chimie, en informatique, voire en mathématiques, contribuant également à élucider la nature « multi-échelles » des problèmes traités.

Toutes ces facettes des activités qui ont contribué à faire progresser des champs à un niveau inégalé seront abordées au fil du rapport. Des exemples seront donnés comme illustration soulignant notamment le caractère souvent interdisciplinaire de nombreux champs thématiques.

Avant d’aborder ces activités nous présentons globalement les thématiques, précisons les effectifs et les structures de recherche.

Thématiques et effectifs

Pour des raisons notamment historiques, les mots-clés de la section 04 ont été listés comme suit :

• Processus fondamentaux en physique quantique, physique atomique, atomes froids, gaz quantiques, métrologie ;

• Molécules et agrégats : en phase diluée, en surface, en phase condensée ; structure et dynamique, applications à la physicochimie ;

• Spectroscopie atomique et moléculaire : applications à l’environnement, à l’astrophysique et aux sciences de la vie ;

• Collisions atomiques et moléculaires : processus réactionnels, interactions avec des surfaces.

• Lasers, optique quantique, optique non linéaire, optique ultrarapide, propagation ;

• Optique dans les solides, matériaux pour l’optique, nanooptique, plasmonique, biopho- tonique ;

• Plasmas chauds : hydro- et magnéto-hydrodynamique, turbulence plasma, instabilités, interaction ondes-particules, physique atomique, sources secondaires, régime relativiste ;

• Fusion thermonucléaire contrôlée (magnétique et inertielle) pour l’énergie.

Ces champs de recherche ne sont pas disjoints et beaucoup d’entre eux interagissent, se chevauchent et se rejoignent. Ces points d’intersection apparaîtront naturellement dans la suite du rapport.

Structure du rapport

Pour une présentation synthétique, les champs ont été regroupés et répartis en quatre thématiques qui constitueront autant de parties du rapport :

• Physique quantique des atomes et des photons ;

• Physico-chimie des molécules, agrégats et nanoparticules ;

• Lasers, optique non-linéaire, photonique et imageries ;

• Plasmas chauds.

Une annexe donne les unités rattachées à la section 04 et les GDR rattachés secondairement.

Effectifs

Chercheurs CNRS. La section compte près de 300 chercheurs(1) CNRS, dont 284 sont affectés dans des unités rattachées à la section 04. S’y ajoute une trentaine de chercheurs émérites. Le taux de femmes, de 19,5 %, y est constant depuis plus de 15 ans. Sur cette période, l’effectif de la section a diminué de 7 %. Le nombre annuel de recrutés baisse depuis une décennie, ayant atteint 5 CRCN en 2019, soit 1/60 de l’effectif total. Si ce taux était maintenu, compte tenu de la pyramide des âges, alors plus de 15 % de l’effectif de la section 04 pourrait avoir disparu d’ici 10 ans. Cette perte, même atténuée de quelques recrutements de DR et quelques changements de section vers la 04, risque de créer des sujets orphelins et la perte des compétences associées.

La répartition par grade est de 52 % en CRCN et 48 % en DR avec des taux de femmes respectifs de

17,5 % et 21,5 % et un âge moyen de 48 ans. La section 04 fait partie des quelques sections qui ont un taux de femmes DR supérieur au taux de femmes global dans la section. Le nombre de chercheurs qui ont atteint les grades DR1 et DRCE est faible, respectivement 46 et 11, soit combiné 19 % de l’effectif. Le nombre de femmes dans ces grades est 9 et 0 soit 15 % de l’effectif féminin.

Les chercheurs de la section 04 affichent une mobilité importante. En 5 ans une trentaine de chercheurs ont changé d’unité ou de région géographique. Avec eux ont migré des sujets et des techniques qui enrichissent le potentiel recherche.

Les chercheurs sont engagés dans diverses tâches d’organisation et de structuration de la recherche allant de responsables d’équipe à chefs de projets nationaux, européens et internationaux. Au 1er janvier 2020, on compte 13 directeurs d’UMR ou FRE, un directeur d’UMI, 9 directeurs de GDR, 1 directeur du centre de physique des Houches, 2 chargées de mission au CNRS et une directrice d’institut. Au niveau européen une quinzaine de projets ERC ont été ou sont menés par des chercheurs de la section 04 depuis une dizaine d’années.

Tableau 1 : chercheurs de la section 04

31/12/2009 31/12/2015 31/12/2017 31/12/2018
DR

femmes

130 135

21 %

145

22 %

144 (48 %)

21,5 %

CRCN

femmes

184 160

19 %

156

17 %

154 (52 %)

17,5 %

Tableau 2 : personnels des unités rattachées à la section 04, au 01/09/2019

Chercheurs CNRS 284
Enseignants-Chercheurs 507
Chercheurs Autres Organismes 49
Doctorants 436
Postdoctorants 50
Autres Chercheurs Non Permanents 108
ITA permanents CNRS 253
ITA Permanents Non CNRS 198
ITA Contractuels CNRS 51
Personnels Temporaires Non CNRS 73

Autres chercheurs, ITAs et non-permanents. Les travaux de recherche relevant de la section 04 sont faits conjointement avec des chercheurs d’autres organismes, des enseignants-chercheurs, des ingénieurs, des personnels en CDD (doctorants, post- doctorants, ingénieurs, etc.) et des chercheurs d’autres sections (notamment des sections 02, 03, 13, 08) ayant des thématiques complémentaires. Le décompte de ces personnels donne environ 600 chercheurs non-CNRS, 500 ITA et 600 doctorants/post-doctorants.

Répartitions

Unités et géographie. Les unités rattachées à la section 04 en principal sont au nombre de 20 (liste en annexe). S’y ajoutent 1 UMI, 4 fédérations de recherche et 9 GDR. D’autres unités (environ 20) s’y rattachent en secondaire via les disciplines étudiées.

Géographiquement les chercheurs (CNRS et non-CNRS) se répartissent sur le territoire métropolitain avec une dominance en Ile de France où plus de 50 % des chercheurs CNRS de section 04 y sont recensés. Une dizaine de chercheurs sont affectés dans des laboratoires internationaux.

Répartition des chercheurs de section 04 au 31/12/2017(2)

Répartition selon les thématiques. La population de chercheurs CNRS se répartit de façon équilibrée sur les 4 thématiques définies ci-avant. La proportion théorie/expérience est difficile à chiffrer car beaucoup de chercheurs peuvent prétendre aux deux étiquettes. Les liens entre expérimentateurs et théoriciens, y compris d’autres sections, sont fréquents et très fructueux comme manifesté dans de nombreuses publications conjointes dans les plus grandes revues. Cette synergie est entretenue depuis longtemps au sein des unités de la section 04.

L’analyse du vivier des candidats au concours CRCN ainsi que les retours des comités Hcéres confirment globalement la répartition équilibrée et montrent que chacune de ces thématiques héberge des sujets porteurs. L’excellence internationale qui leur est associée s’appuie en général sur un héritage culturel et scientifique lié à la pérennité des unités de recherche et à la façon qu’a le CNRS de garder et perpétuer les acquis.

Certaines recherches voient cependant leurs effectifs diminuer d’année en année, comme certains sujets traditionnels de physique atomique, de spectroscopie laser ou de méthodologie de calculs de structures atomiques et moléculaires. Il serait dommageable que ces compétences, détenues en France à un très haut niveau d’expertise, soient compromises sous l’effet de modes ou de priorités données dans les appels à projets.

GDR et réseaux

Les recherches de la section 04 s’appuient largement sur la structuration en groupes de recherche (GDR) et en fédérations de recherche (FR) mise en place par le CNRS. Ces structures sont une source de liens scientifiques et d’échanges. Elles facilitent la mise en commun d’idées ou d’équipements et la construction de projets. Les GDR en question émanent non seulement de l’INP(3) mais aussi d’autres instituts (INSIS, INC, INSB, IN2P3), ce qui témoigne du caractère fortement interdisciplinaire des recherches menées en section 04, en lien avec la physique des particules, l’astrophysique, la nano-physique, l’optique, la chimie, la bio-photonique et les sciences du vivant.

Il est fréquent que des écoles thématiques proviennent des GDR. Elles délivrent des formations spécifiques et d’excellence notamment aux jeunes chercheurs. Certaines sont récurrentes et désormais reconnues au niveau international.

Nous donnons ci-après la liste des GDR et FR attachés à la section 04 à titre principal. Les GDR rattachés à la section 04 en secondaire sont listés en annexe.

• AF : Atomes Froids

• ELIOS : Effets non-linéaires dans les fibres optiques

• EMIE : Edifices Moléculaires Isolés et Environnés

• IQFA : Ingénierie Quantique, Fondements et Applications

• LEPICE-HDE : Lasers énergétiques et intenses et plasmas sous conditions extrêmes

• SPECMO : SPECtroscopie MOléculaire

• THEMS : Dynamique quantique dans les systèmes moléculaires : théorie, modélisation, simulation

• MecaQ : Opto-mécanique et nano-mécanique quantiques

• UP : Ultrafast Phenomena

• FCM : Fédération de Recherche sur la Fusion par Confinement Magnétique ITER

Soulignons aussi le rôle de la Société Française de Physique et plus particulièrement de la division thématique PAMO (Physique Atomique Moléculaire et optique) qui par ses congrès réguliers entretient une véritable vie de la communauté. Une forte proportion des chercheurs de la section 04 en fait partie.

I. Physique quantique des atomes et des photons

La physique quantique, la physique atomique et l’optique quantique sont depuis longtemps des thèmes fondateurs de la section 04. Ils ont fortement évolué en quelques décennies, grâce notamment à l’amélioration incessante des lasers, qui permettent désormais une spectroscopie ultra-précise, grâce aux détecteurs qui permettent la visualisation de particules ou des photons uniques et grâce à l’utilisation de plus en plus courante d’espèces atomiques et ioniques refroidies et piégées.

La maitrise du piégeage est tellement précise – atomes uniques ou en réseau de pièges – que l’on peut contrôler précisément l’interaction entre les atomes et ainsi faire le pont entre la matière diluée et la matière condensée. Ce pont se fait avec un nombre de particules allant de quelques unités à quelques milliers. Ces réalisations expérimentales permettent de répondre à des questions de physique quantique persistantes comme le rôle de l’intrication et de la corrélation. Elles ont aussi permis de réaliser des modèles de matière exotique ou topologique ressemblant à celle de la matière condensée dont les études ont conduit au prix Nobel de 2016.

La précision spectroscopique – métrologie des fréquences – a atteint des records. Avec ses 18 chiffres significatifs, elle permet par la mesure, des expériences pour des tests fondamentaux, le principe d’équivalence, l’électrodynamique quantique ou le modèle standard. Les avancées en métrologie ont conduit à la redéfinition du système international d’unités (avec abandon du kilogramme) pour laquelle les chercheurs du domaine ont été fortement impliqués.

Un kilogramme étalon ; le nouveau système d’unités

Les sources atomiques classiques (vapeurs, jets) d’atomes ou d’ions restent néanmoins très pertinentes pour étudier des processus fondamentaux impliqués dans les technologies quantiques, dans la chimie, dans l’interaction atome-surface, pour explorer les non-linéarités de l’interaction atome-photon ou les processus de collision ou de photo-ionisation. Elles servent aussi dans des études amont du projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor).

Dans ce qui suit, le focus choisi sur les gaz quantiques, la métrologie, les technologies quantiques vise à rendre compte des progrès importants dans ces domaines.

Atomes froids et gaz quantiques

Atomes froids : Ils sont désormais présents dans une dizaine de laboratoires de la section 04, avec diverses espèces (alcalins, gaz rares, alcalino-terreux, etc.) et avec divers types de pièges (cellule, microcircuits, pièges à 3 dimensions ou de dimensions réduites, pièges magnéto-optiques, magnétiques ou tout optique, etc.). Les atomes froids sont au cœur de nombreuses études allant des collisions et molécules froides à la mesure de la gravité en passant par l’interaction avec les photons (métrologie, diffusion, localisation, etc.). Le GDR AF permet de fédérer les différents acteurs.

Les énergies caractéristiques, cinétiques et potentielles, extrêmement basses, vont de pair avec des temps d’évolution typiques accessibles expérimentalement allant de la milliseconde et à la seconde, et permettant l’étude des dynamiques quantiques. Couplée à la détection des atomes individuels, la physique des atomes froids ouvre la porte à l’étude des corrélations quantiques. Enfin, il faut noter l’évolution récente vers les mélanges quantiques, les atomes à deux électrons (strontium, ytterbium…) ou les atomes avec un fort moment magnétique de spin (chrome, dysprosium), qui apportent de nouvelles questions liées aux interactions atome-atome et spin-spin.

Les atomes froids comme sources pour former des molécules (par photoassociation ou par excitations successives permettant l’association des atomes) continuent à être un sujet-clé pour la compréhension de la chimie froide. Le sujet produit des données spectroscopiques de haute résolution et permet des couplages avec les théoriciens- numériciens qui améliorent les descriptions des molécules, les potentiels moléculaires, notamment ceux des états électroniques excités. Il s’en suit souvent des propositions expérimentales ouvrant vers la formation de molécules stables ou dans leur niveau fondamental.

Gaz quantiques. Outre les aspects de mesures de précision (voir le paragraphe suivant), les gaz ultra- froids constituent des systèmes modèles pour la physique quantique et notamment pour la physique à N-corps. A ce titre, les gaz quantiques sont considérés comme des simulateurs quantiques car ils permettent d’étudier, grâce à un environnement contrôlé, des régimes où la théorie et la simulation numérique atteignent leurs limites.

Ainsi, au prix d’une complexité croissante des dispositifs, heureusement contrebalancée par des avancées technologiques, les gaz quantiques simulent la matière condensée et des systèmes fortement corrélés. Pour ces simulations, les gaz quantiques offrent l’avantage d’une interaction entre les particules finement contrôlable, non seulement via leur position mais aussi en changeant la force de l’interaction : cela s’effectue par des champs extérieurs (résonance dite de Feshbach) ou en excitant fortement les atomes (états de Rydberg). Les pièges et les réseaux de pièges sont variables à loisir, en nombre, forme et géométrie, profondeur, grâce à des techniques de pinces optiques de plus en plus fines basées sur l’utilisation de modulateurs de lumière. Ainsi la balance entre piégeage et interaction atome-atome est grandement ajustable.

Sans chercher à couvrir l’ensemble de ces recherches, nous soulignons maintenant quelques résultats récents : la propagation des ondes sonores (1er et 2e sons) dans un gaz à 2D/3D de bosons homogène superfluide ; l’observation du mécanisme de Kibble-Zurek de création de défauts lors de la traversée rapide d’une transition de phase ; la dynamique de spins d’un condensat de chrome ; l’interaction de longue portée géante obtenue par des atomes de Rydberg distants de plusieurs microns ; la formation de gouttelettes quantiques piégées et stabilisées par les fluctuations quantiques. Des phases avec des propriétés topologiques non-triviales ont été proposées, certaines réalisées. Des mélanges quantiques ont permis d’étudier le mouvement contre-propageant d’un condensat de Bose dans un superfluide fermionique.

Les gaz quantiques sont de plus en plus utilisés pour la dynamique. Au-delà de la superfluidité déjà mentionnée, on les utilise pour créer des vortex, pour des études de transport quantique, dans lesquelles sous conditions spécifiques, peut apparaître le chaos quantique ou classique. Ces conditions donnent des réalisations expérimentales pour des sujets fondamentaux historiques mais toujours actuels.

Il serait réducteur de voir la simulation quantique uniquement par les atomes froids. D’autres systèmes offrent des alternatives pertinentes et intéressantes avec des montages expérimentaux parfois plus compacts ou offrant des observables différentes. Tel est le cas des condensats de polaritons, des nano- objets pour l’optique ou des fluides de lumière interagissant avec un milieu non-linéaire. Ces systèmes sont aujourd’hui des systèmes pertinents pour la simulation quantique, par exemple pour l’étude d’équations de Schrödinger non-linéaires.

Métrologie et tests fondamentaux

Tester les théories du modèle standard avec des expériences à basse énergie et de taille humaine est aujourd’hui une réalité tangible grâce aux progrès spectaculaires en métrologie. Les atomes ultra-froids, la manipulation cohérente des ondes de matière et les avancées techniques des lasers sont en effet à l’origine de méthodes expérimentales robustes permettant de mesurer de nombreuses grandeurs physiques à partir de mesures de fréquences. C’est pourquoi il est important de développer et disséminer des références de fréquence exactes et ultra-stables.

La France dispose des meilleures horloges micro-ondes du monde. Elles utilisent des atomes froids dans un dispositif de fontaine, et définissent actuellement la seconde. En matière de précision les horloges micro-ondes sont supplantées depuis quelques années par les horloges optiques qui utilisent l’atome de strontium et de mercure. Leurs performances en stabilité et en exactitude sont à l’état de l’art. Même si les atomes neutres sont prometteurs, la meilleure horloge optique est pour l’instant une horloge à ions. Notons aussi que certains groupes dans le monde progressent dans l’exploration de transitions nucléaires situées dans le domaine optique en particulier dans le thorium.

Pour effectuer les mesures de précision, la référence de fréquence d’une horloge très précise doit être accessible et comparée. Pour ce faire, ces dernières années, la communauté a initié le réseau REFIMEVE+ (REseau FIbré MEtrologique à Vocation Européenne+) qui transporte déjà la référence de fréquence entre quelques universités à travers le réseau fibré. L’extension de ce réseau va permettre bientôt la dissémination de la référence de fréquence dans de nombreux laboratoires français et vise ensuite l’échelle européenne. Ce réseau permettra aussi d’enrichir les données des inter-comparaisons entre horloges atomiques sur le long terme qui sont exploitées par les théoriciens pour contraindre les modèles théoriques dédiés à la recherche de la signature de la matière noire.

La France a un rôle de premier plan en interférométrie atomique, avec la meilleure mesure de la constante de structure fine et les meilleurs senseurs inertiels. S’en suit son implication dans de grands projets qui en dépendent.

La constante de structure fine est maintenant déduite de la mesure du rapport h/M (constante de Planck sur la masse de l’atome de rubidium) par une technique combinant interférométrie atomique et oscillations de Bloch. Le niveau d’exactitude est tel qu’il fournit le test le plus précis de l’électrodynamique quantique. Avec la nouvelle définition du kilogramme, cette méthode va relier avec précision la masse d’un atome à une mesure de fréquence.

Après deux décennies de recherche, le bilan concernant les senseurs inertiels (gyromètres et gravimètres atomiques) est remarquable. Ils ont conduit, non seulement à des appareils de terrain pour la géophysique, mais aussi à de grands projets de physique fondamentale. De façon générale, un interféromètre atomique mesure un déphasage imprimé sur l’onde de matière ; provenant de différents types d’interactions. Avec cette approche, on tente d’étudier les forces à courte distance entre un atome et une surface afin de mesurer la gravitation à courte distance et la force de Casimir. Il est aussi envisagé via le projet MIGA (Matter wave laser based Interferometer Gravitation Antenna) d’obtenir une signature d’onde gravitationnelle, complémentaire de celle de LIGO/VIRGO. Les senseurs inertiels sont aussi candidats pour tester la neutralité de l’atome ou pour des mesures en mission spatiale.

Signalons aussi que l’expertise métrologique française est un élément-clé dans des collaborations internationales, comme celle de GBAR (Gravitational Behaviour of Antihydrogen at Rest) qui vise à tester le principe d’équivalence sur l’anti-hydrogène, ou celle d’ELGAR (European Laboratory for Gravitation and Atom- interferometric Research) dont l’ambition est de réaliser un premier interféromètre atomique à grande échelle pour détecter les ondes gravitationnelles.

La métrologie des fréquences est aussi une clé de la spectroscopie de haute résolution, notamment pour celle de l’hydrogène ou celle de molécules chirales dans le but de percer l’énigme du rayon du proton ou de la violation de la parité.

Technologies quantiques

Optique quantique. Ce domaine regroupe les études dans lesquelles la lumière est un objet quantique, ainsi que son interaction avec la matière. Les variables quantiques du photon, à savoir l’énergie, le moment linéaire, la polarisation et le moment orbital angulaire, sont mises à profit pour créer des états quantiques, des superpositions, des intrications et réaliser des situations purement quantiques où les descriptions classiques ne peuvent plus être pertinentes. L’interaction photon-matière, pour la section 04, concerne surtout l’atome ou des systèmes de particules quasi-isolées qui s’y apparentent, comme les plots quantiques (quantum dots), les centres NV (Nitrogen Vacancy), ou les dopants en matrice cristalline.

Le caractère quantique se dévoile notamment pour le photon unique ou en faible nombre, mais aussi lors de l’interaction photon-atome qui engendre l’intrication. Ces situations permettent de prouver par l’expérience les concepts de la mécanique quantique, certains d’entre eux, anciens, n’ayant trouvé de réalisation que très récemment, comme le chat de Schrödinger. Les avancées du domaine sont nombreuses, et reposent grandement sur le partenariat théorie-expérience pour définir des protocoles. Ces expériences de pointe ont non seulement bénéficié de progrès technologiques remarquables mais en ont engendré à leur tour : sources de photons uniques, de paires de photons, façonnage modal, propagation à longue distance, propagation guidée, détection en phase et en comptage de haute efficacité.

Bon nombre d’expériences amont utilisent néanmoins des faisceaux lumineux classiques à des fins très fondamentales pour valider et améliorer des processus qui sont la base des technologies quantiques : citons par exemple l’effet de la mesure, l’effet de la décohérence, les processus EIT (Electromagnetically Induced Transparency) ou CPO (Coherent Population Oscillation) réalisant des mémoires quantiques, les protocoles de restitution du photon, la cryptographie quantique, la maîtrise du bruit quantique ou les fluides de lumière.

L’optique quantique a des retombées avec de la valeur ajoutée. Citons l’opto-mécanique qui a permis d’améliorer la sensibilité des détecteurs de VIRGO et la propagation du photon en milieu désordonné qui laisse entrevoir la possible imagerie en milieu turbide. Ces progrès d’optique quantique sont en lien étroit avec les avancées en optique (voir III).

Technologies quantiques. Cette thématique est apparue nationalement et internationalement suite à des progrès technologiques qui permettent d’aborder de nouveaux défis : la physique quantique à un stade ultime pour l’utiliser comme des technologies porteuses. Au niveau national elle est animée par le GDR IFQFA qui rassemble régulièrement les acteurs du domaine. Elle a récemment déclenché de grands investissements en Allemagne en Angleterre, aux USA et en Chine et a fait ressortir un besoin fédératif au niveau européen qui s’est traduit par la création du Quantum Flagship.

Les technologies quantiques concernent plusieurs thèmes et sous-thèmes de ce rapport (atomes froids, optique quantique, nano-objets, optique, nano- optique) et auraient pu être présentées en axe transversal. Le choix de positionnement en partie I correspond aux ressources principales de ce domaine, à savoir la physique quantique et l’optique quantique. Des ponts existent avec des domaines proches (photonique, nano-physique, nano-électronique, supraconducteurs, etc.) couverts aussi par les sections 02, 03, 05 ou 08.

Les technologies quantiques sont en général déclinées selon quatre rubriques :

– Le calcul quantique qui repose sur le principe de superposition d’états et qui étudie des protocoles, des algorithmes, des codes de correction, pour un calcul théoriquement plus efficace qu’avec les ordinateurs actuels.

– La simulation quantique qui réalise des systèmes quantiques et les mesure après évolution. Elle permet de comprendre des processus difficiles à prédire et à simuler par le calcul ;

– Les communications quantiques qui visent un codage inviolable et une communication sécurisée, basée sur la propagation de paires (ou davantage) d’objets quantiques intriqués. Toute intrusion – ou incident – sur l’un des objets lors de la propagation est alors détecté sur l’objet dual ;

– Les capteurs quantiques qui utilisent les objets quantiques (ondes de matière, centres NV, photons etc.) pour des mesures ultra-sensibles et à des échelles très petites pour le magnétisme, la gravité, le positionnement, etc.

Ces recherches examinées du point de vue très fondamental en section 04 sont en lien avec de réels développements et ont fait émerger des startups qui relaient les avancées du domaine vers le monde industriel.

II. Physico-chimie des molécules, agrégats et nanoparticules

La physique moléculaire apporte des informations structurales et dynamiques sur des espèces isolées ou environnées. Nous indiquons ici quelques avancées méthodologiques expérimentales et théoriques ayant permis au cours des dernières années un progrès des connaissances dans ce domaine et dans les disciplines aux interfaces : astrophysique, atmosphères, interfaces solide/gaz, biochimie en solution.

La spectroscopie moléculaire est une discipline de cœur de métier qui élargit sans cesse son périmètre au rythme des progrès méthodologiques et techniques et irrigue beaucoup d’applications dans des domaines très variés. Les ruptures technologiques concernent notamment les sources lumineuses, plus précises, couvrant une région spectrale étendue et donnant accès à de nouvelles informations quantitatives sur les milieux ou, plus qualitativement, sur des effets physiques encore peu explorés.

L’essor des lasers ultra-courts a conduit à une meilleure compréhension de la dynamique électronique et nucléaire des systèmes moléculaires. La diversité des longueurs d’onde et l’augmentation des taux de répétition permettent d’aller vers les problématiques fondamentales sur des systèmes modèles et sur des édifices moléculaires complexes impliqués dans les processus naturels. Ces connaissances structurales et dynamiques traitent de processus de plus en plus complexes aux interfaces des disciplines voisines et d’intérêt sociétal telles que la composition de l’air, les molécules d’intérêt pharmaceutique, la production et le stockage d’énergie ou d’information.

Spectroscopie d’édifices moléculaires

Les évolutions récentes en spectroscopie concernent divers domaines dans lesquels les équipes françaises jouent un rôle moteur au niveau international. L’extension des domaines spectraux a été permise par des sources synchrotron à très large gamme spectrale comme SOLEIL (Source Optimisée de Lumière d’Energie Intermédiaire du LURE) ou XFEL (X-ray Free-Electron Laser) et dans le domaine THz (laser à cascade quantiques et mélanges optiques). Ces sources ont été accompagnées de développement des techniques à dérive de fréquence notamment dans le domaine millimétrique.

La précision accrue des mesures est particulièrement frappante pour les petites molécules. Elle résulte du développement des peignes de fréquences et de la distribution de références ultra- stables par réseau fibré. Elle permet des tests de physique fondamentale (voir I) mais aussi de quantifier les densités moléculaires des atmosphères ou du milieu interstellaire via une spectroscopie quantitative en intensité et en profil de raies.

La diversité des systèmes étudiés s’est vue largement étendue en particulier vers (i) des petits systèmes modèles présentant une forte complexité intrinsèque : mouvements de grande amplitude, multiples couplages d’états électroniques excités impliquant des intersections coniques ou portés à des températures élevées ; (ii) des espèces radicalaires ou réactives à faible durée de vie mais d’importance pour la chimie atmosphérique ou l’astrochimie ; (iii) des systèmes moléculaires comportant un très grand nombre de degrés de libertés vibrationnels ou électroniques : biomolécules, hydrocarbures poly- aromatiques, fullerènes, agrégats moléculaires, complexes métaux-ligands, nanoparticules…

En parallèle, il est à noter les forts développements des spectroscopies de dichroïsme circulaire vibrationnel ou de photoélectrons en phase gazeuse pour étudier finement la conformation de complexes isolés et chiraux comme des systèmes modèles de la reconnaissance moléculaire d’intérêt biologique et pharmacologique.

En outre, on assiste désormais à l’usage conjoint de diverses techniques de spectroscopie (IR, UV- visible, Auger, photoélectrons, photodissociation, imagerie…) sur un même dispositif, d’une variété de sources (jet de nano-gouttes, sources à condensation, piège ionique cryogénique) et de multiples techniques d’analyse (spectrométrie de masse, de mobilité ionique, dichroïsme circulaire, transfert résonnant d’énergie ou de charge entre donneur et accepteur…).

Au plus près des expériences, la modélisation a elle-aussi connu des progrès considérables. Elle a accru sa capacité à traiter des états ro-vibrationnels ou électroniques de plus en plus excités, développé des approches hamiltoniennes effectives pour un traitement quantique numériquement exact et y a inséré des approches explicitement dépendantes du temps. Les spectres caractérisant la dynamique électronique ou vibrationnelle sont désormais accessibles et interprétés pour des familles plus vastes de molécules, isolées ou en environnement contrôlé. La diffusion des codes aux non-spécialistes (notamment en chimie quantique) et l’alimentation croissante des bases de données en sciences de l’univers contribuent aux avancées notables de la discipline.

Dynamiques électronique et nucléaire

L’émergence des sciences attosecondes constitue l’une des avancées récentes les plus remarquables. Ces techniques donnent accès à l’échelle de temps du mouvement des charges à l’échelle atomique et permettent d’appréhender la corrélation électronique, l’intrication quantique et la cohérence quantique, la mesure des temps de photo-ionisation ou de couplage électron-vibration, etc. L’observation en temps réel de la construction de résonances de Fano, les mesures de temps de photo-ionisation moléculaires, en particulier pour des molécules chirales, l’étude de la dynamique d’ions d’intérêt astrophysique figurent parmi les résultats marquants récents obtenus dans l’hexagone. Ces expériences en plein essor nécessitent des dispositifs très complets où les vitesses de tous les produits sont mesurées en coïncidence. L’expertise nationale dans le domaine profite ici de l’atout des grands instruments. Du point de vue théorique, cette évolution vers les sources attosecondes s’est accompagnée de développements méthodologiques capables de traiter de façon simultanée les dynamiques des électrons et des noyaux en s’affranchissant des grilles spatiales et des bases de fonctions usuelles tout en incorporant le grand nombre d’états électroniques impliqués dans de telles excitations ultra-brèves.

Le couplage à de nouvelles sources moléculaires variées (jets liquides, d’agrégats ou de nanoparticules, sources d’ions) a également permis l’ouverture à des problématiques en femto-chimie telles que la caractérisation de la dynamique de relaxation collective, l’étude de transferts d’électron, de proton ou encore d’hydrogène. Aux temps plus longs, les développements des techniques de jets par écoulement uniforme, de piégeage par confinement électromagnétique (pièges multipolaires, anneaux de stockage) contribuent à l’élucidation des mécanismes de nucléation, d’isomérisation, d’évaporation voire même de relaxation radiative ou par fluorescence.

Ce domaine bénéficie lui aussi d’une forte synergie avec les théoriciens du problème à N corps quantique. Au cours des dernières années, un effort sans précédent a ainsi été mené pour combiner des méthodes issues de communautés différentes afin d’inclure les degrés de liberté électroniques dans la dynamique des noyaux, essentielle pour décrire les processus de relaxation consécutifs à une excitation électronique. Ainsi, parmi les approches permettant de décrire la dynamique des noyaux en temps réel, celles basées sur un traitement mixte classique- quantique comme les méthodes à sauts de surfaces ou les méthodes de propagation de paquets d’ondes telles que MCTDH (MultiConfigurational Time-Dependent Hartree) ont connu récemment une vaste diffusion. Dans le domaine des collisions atomiques et moléculaires, la résolution d’équations couplées a vu sa capacité prédictive fortement renforcée en particulier pour les régimes froids et ultra-froids.

En phase liquide, les approches de spectroscopie de cohérence et multidimensionnelles, notamment dans l’infrarouge, continuent à se développer en lien avec les progrès des sources. Originellement limitées aux couplages entre modes de vibrations, elles sont à présent étendues à l’UV pour l’étude des couplages électroniques. L’enjeu est d’aborder des systèmes intrinsèquement multi-échelles et hétérogènes en photochimie et photobiologie afin de comprendre les architectures moléculaires photo-actives de complexité croissante mettant en jeu une succession d’actes élémentaires à des échelles spatio-temporelles diverses (commutation de protéines fluorescentes, transfert de ligands dans les hémoprotéines, etc.). De nouvelles approches liées à l’interaction de molécules aux interfaces solides métalliques ou semi- conducteurs sont également apparues en lien avec la photo-catalyse, la plasmonique chimique ou le photovoltaïque. Les couplages entre la chimie de synthèse, la physico-chimie et la spectroscopie ultrarapide y sont de plus en plus répandus.

L’étude théorique des molécules en interaction avec la phase condensée en présence d’effets quantiques s’est largement développée et permet désormais d’aborder de façon réaliste des processus comme la réactivité sur des surfaces, l’échange et la relaxation d’énergie entre différents degrés de liberté consécutivement à une excitation laser, une collision ou une ionisation. Les approches combinent dynamique quantique, classique, mixte traditionnelle mais aussi dissipative, ce qui permet d’étudier de grands nombres de degrés de liberté et d’intégrer le rôle des phonons ou le couplage avec les paires électron-trou ou les effets d’environnement d’un chromophore dans une molécule biologique ou d’une cellule photovoltaïque. L’environnement quantique extrême des nano-gouttes d’hélium superfluide ou des matrices d’hydrogène a également donné lieu à des développements théoriques importants, aussi bien pour les propriétés d’équilibre (formation de structures exotiques) que pour les processus dynamiques proprement dits (alignement non- adiabatique de molécules, dynamique photo-induite).

Physique moléculaire et interfaces

Les informations pouvant être recueillies en laboratoire sur des molécules ou édifices isolés s’avèrent de première importance dans divers domaines concernés par les milieux dilués, aux premiers rangs desquels on trouve l’astrophysique et la physico-chimie des atmosphères. La modélisation de ces environnements nécessite la connaissance de données précises et les missions spatiales récentes (Rosetta, Cassini-Huygens) ou prochaines comme JUICE (JUpiter ICy moons Explorer) du système solaire ainsi que les instruments ALMA (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array) et bientôt JWST (James Webb Space Telescope) y entretiennent une demande forte.

Au tout premier plan, la spectroscopie à haute résolution s’avère incontournable pour une grande variété d’applications astrophysiques allant de la détection de molécules organiques complexes dans le milieu interstellaire ou dans les comètes à la caractérisation des atmosphères (exo-)planétaires pour lesquelles la détermination des continua d’absorption reste à poursuivre. Il s’agit ensuite pour la phase diluée de déterminer les sections efficaces d’ionisation et de dissociation de molécules isolées, d’agrégats et de nanoparticules, d’identifier les produits de réactions et de mesurer les rapports de branchements et la cinétique. L’apport du rayonnement synchrotron et des collisions avec des ions est ici indiscutable. Les progrès en modélisation moléculaire permettent par ailleurs une confrontation avec les résultats en régime froid impliquant des effets quantiques spectaculaires. Une connaissance approfondie des processus état-à-état s’avère enfin nécessaire pour extraire les paramètres physiques (densité, température) essentiels à la connaissance des processus en jeu dans le milieu interstellaire.

Les applications à l’atmosphère terrestre, notamment liées au changement climatique, sont plus que jamais d’actualité et nécessitent une précision extrême sur les profils spectraux, expérimentalement mais aussi en termes de nouveaux modèles théoriques. Ces données sont cruciales pour nourrir les codes de transfert radiatif et pour l’étude de l’atmosphère par télédétection. La physico-chimie des composés impliqués dans la formation de particules atmosphériques sub-microniques telles que les aérosols organiques secondaires est d’un intérêt croissant au vu de leurs effets reconnus sur la santé, la qualité de l’air et le climat. Leur meilleure compréhension passe par la caractérisation spectroscopique, l’étude des mécanismes de formation et de vieillissement, des cinétiques et de la réactivité en phase hétérogène.

Plus généralement, l’étude des interactions des molécules sur les surfaces reste un champ d’activité particulièrement actif dans ses composantes fondamentale, appliquée, et pour le contexte astrophysique. L’ingénierie des surfaces bénéficie désormais d’une grande variété de composés de synthèse, d’une maîtrise progressive des processus auto-organisés ou induits et des méthodes de suivi de croissance. Elle permet d’élaborer des systèmes hybrides, où l’objet d’étude interagit avec des nouveaux matériaux à 2 dimensions, des supports nano-structurés (réseaux de nanoparticules, réseaux de contraintes par épitaxie) ou des dispositifs dispersion, des couplages électroniques, excitoniques ou plasmoniques.

En sciences de l’univers, il est désormais établi que les processus se déroulant sur les surfaces sont essentiels à la formation de molécules organiques complexes dans les environnements froids dont le milieu interstellaire. L’étude des couches adsorbées sur les grains de poussière requiert, en lien avec les observations de la phase gazeuse, la détermination des barrières de désorption afin d’expliquer la richesse moléculaire observée. Les expériences de laboratoire sur des systèmes moléculaires condensés ont révélé la grande complexité des transformations dues à la concomitance de nombreux processus : changements de phase et morphologie de glace, recombinaisons de radicaux, désorption ou diffusion induites par la chimie ou la radiation, pulvérisation, etc. La quantification de ces processus, qui permettra de les intégrer dans des modèles astrophysiques de ces milieux, n’en est qu’à ses débuts. Alors que les mélanges de glaces et d’édifices hydrocarbonés sont intensivement étudiés pour imiter les systèmes astrophysiques réels, la modélisation numérique cherche à adapter à ces besoins spécifiques les méthodes de chimie quantique.

Enfin, la physico-chimie des systèmes moléculaires d’intérêt biologique continue à se développer par la caractérisation structurale et dynamique d’objets de plus en plus grands (protéines, brins d’ADN, biopolymères…) qui apportent des connaissances sur les changements d’états électroniques et de conformations à différentes échelles de temps et sur leur réactivité chimique intrinsèque. Les améliorations méthodologiques des sources, des diagnostics optiques et des modélisations profitent en particulier aux sciences analytiques.

III. Lasers, optique non linéaire, photonique et imageries

L’optique est un domaine qui couvre plusieurs sections du CoNRS et plusieurs instituts. En section 04 les thématiques sont recentrées sur les aspects fondamentaux ; c’est ainsi que cela apparaitra dans ce qui suit. Un bon nombre d’équipes néanmoins les couplent à des technologies innovantes voire du sociétal ; on donnera quelques exemples.

L’optique contemporaine repose beaucoup sur les avancées des sources laser, constamment en évolution et en création depuis 50 ans pour aller vers plus de puissance, plus d’accordabilité, plus d’énergie par impulsion et davantage de modes de fonctionnement. Des avancées significatives réalisées ces dernières années auront des conséquences considérables à la fois sur la compréhension des processus fondamentaux au-delà du domaine de l’optique (turbulence optique, phénomènes extrêmes, ondes scélérates, phases topologiques) et sur les nouvelles technologies en télécommunications (fibres optiques), en imagerie (contrôle de front d’onde) ou en métrologie (précision des fréquences).

Le prix Nobel 2018 dont la thématique de recherche se rattache à la section 04 illustre à la fois l’importance de ces avancées mais aussi les retombées de l’optique (G. Mourou et D. Strickland pour leurs avancées sur les impulsions lasers ultracourtes, A. Ashkin pour ses travaux sur les pinces optiques).

Ces sources laser servent à de nombreux champs disciplinaires, dont certains donnés en partie I et II. Dans cette partie on présentera ceux qui ont trait principalement à l’optique : optique non linéaire, nano-optique, imagerie et bio-photonique.

Sources lasers

L’activité récente autour du développement de sources lasers toujours plus puissantes et compactes est extrêmement féconde, portée en cela par de plus en plus de champs applicatifs et interdisciplinaires : biologie, communications, physique des plasmas, environnement ou médecine et même en hydrodynamique, pour n’en citer que quelques-uns.

Outre les besoins en puissance moyenne, les recherches sur ces sources visent à augmenter la gamme spectrale accessible (du THz au VUV) et à étudier leur fonctionnement dans des régimes impulsionnels jusque-là réservés à certaines plages de longueurs d’onde. Ces nouvelles sources cohérentes à impulsions ultracourtes, avec des caractéristiques spatiales maîtrisées et de très faibles bruits (de phase ou d’intensité) se développent du VUV au moyen infrarouge.

Des études spectroscopiques approfondies sont consacrées à l’optimisation de nouveaux matériaux lasers, notamment des ions de terres rares et des métaux de transition dans divers types de matrices (cristaux, semi-conducteurs, verres massifs, guides d’ondes, fibres optiques conventionnelles ou micro- structurées). Le développement de nouveaux types de cristaux optiques non-linéaires et l’ingénierie de l’accord de phase ont permis notamment d’étendre les gammes spectrales accessibles sur des lasers monomodes compacts comme sur des chaînes laser de hautes énergies.

L’étude de sources THz utilisées notamment en imagerie connait un intérêt croissant : ces sources de plus en plus performantes sont des lasers à cascade quantique, des dispositifs optoélectroniques basés sur des transitions inter-sous bandes, ou des dispositifs non-linéaires.

De nouvelles sources lasers dans le domaine visible, basées sur des cristaux dopés en terres-rares, des fibres à double gaine, ou des guides d’ondes constituent un sujet d’étude très porteur avec nombre d’applications à venir notamment en bio-photonique ou encore pour la génération simplifiée de sources cohérente dans l’UV.

De nouvelles sources gagnent en maturité et permettent de reconsidérer certaines applications : lasers organiques accordables à capsules jetables, lasers pompés par LED à haute efficacité énergétique, lasers en guides d’onde femtosecondes ultra compacts, lasers bi-fréquences ultrastables permettant de transporter des informations codées sur porteuse optique ou même des lasers aléatoires reposant sur l’utilisation de milieux très désordonnés mais dont les modes spatiaux sont néanmoins finement contrôlés.

Le développement de sources délivrant des impulsions de l’ordre du cycle optique est également un sujet très dynamique. La conception de techniques de façonnage temporel et d’amplification en régime ultracourt est au cœur des préoccupations de la communauté. Elle s’accompagne d’une recherche de nouveaux matériaux amplificateurs afin d’étendre la gamme des longueurs d’onde depuis l’UV à l’IR, notamment pour la génération d’impulsions attosecondes. Atteindre de telles durées pose naturellement la question de la métrologie des impulsions produites ; des efforts importants pour développer des outils de caractérisation innovants sont donc requis.

Enfin, la phase de porteuse qui fixe l’évolution du champ électrique sous l’enveloppe de l’impulsion, est devenue un paramètre contrôlable. Il est ainsi possible aujourd’hui de réaliser des peignes de fréquences très robustes pour des mesures spectroscopiques rapides et de haute précision.

Dynamique non linéaire complexe en optique

L’optique non linéaire est intimement liée à la dynamique non linéaire en général. Les instabilités inhérentes aux systèmes non linéaires, efficacement décrites par celle-ci, ont permis la mise en évidence et la compréhension d’un nombre considérable de phénomènes physiques qui aujourd’hui dépassent largement le seul domaine de l’optique non linéaire. Actuellement les systèmes optiques non linéaires offrent un moyen sans équivalent pour observer expérimentalement des phénomènes complexes apparaissant dans de nombreuses disciplines, largement étudiés mais très peu compris comme le chaos spatiotemporel, la turbulence ou plus récemment les ondes scélérates optiques.

Ces dernières désignent à l’origine des ondes de surface océaniques d’amplitude anormalement élevée. Ces « murs » d’eau dévastateurs sont de courte durée, et constituent l’une des manifestations fascinantes de la force de la nature. Elles apparaissent de nulle part et disparaissent sans laisser de trace. Ces vagues dévastatrices constituent donc un défi mondial majeur à résoudre en raison de l’augmentation incessante du trafic maritime. En particulier, l’étude de la propagation de rayonnement dans une fibre optique, où des effets fortement non linéaires sont obtenus, engendrant la génération d’ondes scélérates dans des super continuums conduit à mener des parallèles fructueux avec l’hydrodynamique. Un apport considérable a été fourni par l’optique non linéaire dans la direction (qui doit être poursuivie) de la compréhension du mécanisme de formation de ces ondes extrêmes. Généralement, ces dernières apparaissent dans des champs chaotiques ou turbulents tels que la surface de l’océan, mais aussi les fibres optiques, les systèmes lasers, les condensats de Bose-Einstein et même dans le vide sous forme de fluctuations quantiques.

Les mesures optiques ultrarapides en temps réel aux échelles de temps picoseconde et sub-picoseconde sont essentielles dans de nombreux domaines scientifiques, comme la métrologie, la biologie ou l’optique non linéaire. En particulier, il existe un besoin urgent de développer de nouvelles techniques capables de mesurer des événements non répétitifs tels que les transitoires d’imagerie, les instabilités et les événements extrêmes, car ils ne peuvent pas être capturés par des techniques électroniques ultrarapides ou des configurations de pompe-sonde optique. L’accès à ces événements nécessite plutôt des approches optiques ultrarapides en une seule prise, ce qui est l’objectif des techniques d’étirement temporel telles que la lentille temporelle et la microscopie temporelle. Bien que le principe de telles méthodologies soit connu depuis des décennies ce n’est qu’au cours des dernières années que des techniques expérimentales pratiques ont été développées, capables de réaliser le potentiel de caractérisation en temps réel en permettant des mesures d’amplitude et de phase de champs turbulents avec une grande précision.

L’observation et le contrôle de nouveaux phénomènes complexes deviennent aujourd’hui possibles grâce aux fibres optiques non linéaires microstructurées qui offrent des configurations inédites en régimes multimodes et multicœurs. Le rayonnement à la sortie de la fibre est alors contrôlé par l’ajustement du rayonnement à l’entrée à des degrés de précision jamais atteints auparavant.

Grace à la mise en œuvre de paquets d’ondes à polaritons cohérents dans une microcavité, les propriétés de superfluidité des polaritons ont été démontrées et observées expérimentalement. Ce résultat a ouvert la porte à l’étude des effets hydrodynamiques quantiques dans les polaritons, tels que la nucléation des solitons sombres et des tourbillons (vortex) quantifiés ou un nouveau type d’excitation non linéaire, appelé demi-soliton. Plus remarquable encore est l’émergence de régimes chaotiques voire turbulents dans ces mêmes fluides.

Un sujet qui est en plein essor, avec déjà des résultats remarquables concerne les propriétés topologiques de la lumière dans les réseaux optique et photonique. Il s’agit là de techniques reposant sur la mise en œuvre de réseaux de micro-piliers à géométrie bien contrôlée permettant d’étudier la physique topologique dans le domaine de la photonique.

Ces dernières années ont vu un renouveau dans le domaine des structures stationnaires ou propagatives de type solitons ou structures localisées temporelles ou spatiales sous forme de solitons vectoriels ou multi-solitons. Ils sont générés par un couplage non linéaire ou par des effets de polarisation et leur dynamique complexe est également activement étudiée dans différents systèmes fortement dissipatifs : lasers à blocage de modes ou à semi- conducteurs, ou encore valves à cristaux liquides.

Nano-optique

La nano-optique bénéficie des avancées dans les nanomatériaux et la nano-structuration de surfaces. Sa démarche est de plus en plus multidisciplinaire, tant sur les concepts que les applications visées dans un contexte de forte miniaturisation.

Un axe très fécond en nano-optique est l’étude de nano-objets, isolés ou associés en nano-structures simples, avec l’objectif de comprendre et moduler leurs propriétés et l’influence de l’environnement, de les inclure au cœur de dispositifs optoélectroniques ou de les utiliser comme marqueurs ou sources locales de lumière. Un des objectifs est de réaliser dans le domaine de la physique du solide des dispositifs pour l’optique quantique, complémentaires à ceux de la physique atomique.

La réalisation de sources de photon unique reste un objectif qui mobilise les équipes de recherche dans le domaine de la nano-optique.

Les nano-diamants fluorescents contenant au moins un centre coloré du type NV sont disponibles avec des tailles réduites à quelques nanomètres. Leur grande photo-stabilité et la possibilité de préparer et lire optiquement leur spin ouvrent un vaste champ d’études : magnétométrie ultrasensible, marquage biologique, registres quantiques, plasmonique ou opto-mécanique.

Un enjeu important est de confiner le champ dans des cavités de structures photoniques contenant des nano-émetteurs afin de maximiser leur interaction. Les nano-structures diélectriques (cristaux photoniques, piliers, nano-sphères) présentent l’avantage d’être peu absorbantes et de permettre un confinement important de la lumière. Des géométries innovantes de cristaux photoniques exploitant le ralentissement de la vitesse de groupe à proximité des bords de bande photonique, ou l’ingénierie du désordre ont permis d’augmenter le confinement. L’extraction de la lumière à partir de ces structures très confinantes reste un défi important.

Le fort confinement et l’ingénierie de l’extraction des photons offerts par les structures photoniques ont motivé le développement de sources lasers intégrables, la technologie planaire des cristaux photoniques permettant le guidage de la lumière et ainsi la réalisation de circuits optiques.

La possibilité d’exciter électriquement des plasmons sous pointe STM ouvre la voie à une plasmonique réellement nanométrique qui devrait être utile pour l’étude de la propagation d’information aux échelles ultimes.

Dans le contexte des forces lumière-matière, le contrôle de l’excitation des plasmons localisés a conduit à des nouvelles pinces optiques, dites « pinces plasmoniques », alors que les plasmons délocalisés peuvent être façonnés pour le transport et le tri de particules en environnement micro-fluidique.

La thermo-plasmonique permet aussi de stimuler à distance des nano-sources de chaleur, avec des applications en oncologie.

La plasmonique utilise désormais l’aluminium, le graphène pour un couplage efficace entre nano- électronique et nano-optique, ou encore des semi- conducteurs pour une plasmonique rapide, accordable dans le visible et moyen IR, et intégrable.

Imageries et bio-photonique

Dans le domaine de la bio-photonique, un des buts actuels est de faire le pont entre les échelles micrométriques et nanométriques afin de quantifier plus finement les phénomènes biologiques. Pour cela les efforts ont porté ces dernières années sur l’amélioration de la résolution spatio-temporelle des méthodes d’imagerie et l’imagerie en profondeur. Avec des méthodes d’échelles très différentes on peut ainsi aller du suivi de la molécule unique à l’observation d’un embryon ou d’une partie d’organe. Les différentes microscopies de fluorescence super-résolues comme STORM (STochastic Optical Reconstruction Microscopy), PALM (PhotoActivated Localization Microscopy) ou STED (STimulated Emission Depletion), ont connu un grand essor ; elles permettent désormais une résolution inférieure à la limite de diffraction. L’étape suivante sera une microscopie super-résolue in vivo et avec une vitesse d’acquisition élevée permettant d’observer en temps réel le vivant. La méthode SUSHI (Shadow Imaging) combinée au STED qui utilise un fluorophore diffusible dans l’espace extracellulaire est très prometteuse.

L’imagerie en profondeur repose sur d’autres approches, notamment des techniques à plusieurs photons. On peut citer la microscopie SPIM (Selective Plane Illumination Microscopy), dite à feuille de lumière, qui consiste en une série de plans lumineux détectés par une caméra judicieusement placée. L’imagerie en profondeur se heurte encore à la déformation du front d’onde et à la diffusion de la lumière, ce qui justifie des travaux dans ces domaines, à savoir l’optique adaptative, le filtrage, la démodulation mais aussi l’étude de la propagation dans des milieux fortement diffusants et les méthodes matricielles associées pour la reconstruction.

A côté des microscopies de fluorescence, les microscopies basées sur l’optique non-linéaire se sont fortement développées. Elles exploitent la conversion de fréquences du milieu biologique lui-même pour du doublage ou triplement de fréquences, et sont des alternatives avantageuses non-invasives car ne nécessitant pas un marquage préalable du système étudié. Elles sont très bien adaptées aux milieux anisotropes comme les fibres de collagène ou les membranes intracellulaires ou plasmiques. La technique CARS (Coherent anti-Stokes Raman Spectroscopy), une autre microscopie non-invasive qui repose sur l’usage cohérent de deux faisceaux laser d’excitation dits pompe-sonde, ne cesse de progresser ; elle est particulièrement adaptée aux structures cellulaires enrichies en lipides comme les membranes et gouttelettes cytoplasmiques.

De plus en plus, les techniques précédemment citées sont combinées entre elles, répondant ainsi à un ensemble de questions en sciences du vivant. Il est indéniable qu’elles s’appuient aussi sur les progrès des sources laser, celles en impulsion par exemple, des fibres optiques, des caméras et des capacités de stockage et d’analyse des images.

Ce domaine à valeur ajoutée sociétale bénéficie non seulement des collaborations entre expérience et théorie mais aussi de l’interdisciplinarité. En témoigne le nombre de publications et brevets associant des chercheurs de la section 04 à des partenaires d’autres domaines ou d’autres organismes ainsi que le succès d’écoles thématiques, telles que MiFoBio (Microscopie Fonctionnelle en Biologie), Multimaging (Imaging in wave physics : multi-wave and large sensor networks) ou WACO (WAves in COmplex media from theory to practice).

Des GDR abordent désormais la propagation des ondes en milieu complexe, la conception de systèmes imageurs ou le traitement d’images. Ces développements pourront faire avancer par exemple les neurosciences, dans les domaines cliniques et diagnostiques.

IV. Plasmas chauds

La physique des plasmas chauds est étroitement liée au développement de grandes infrastructures comme ITER, LMJ-PETAL (Laser MégaJoule – PEtawatt Aquitaine Laser), ELI (Extreme Light Infrastructure) ou APOLLON. Elles engendrent des questions de physique fondamentale sur l’interaction lumière-matière dans des régimes de champs extrêmement intenses, sur le rôle du rayonnement émis dans le plasma, sur l’interaction entre plasma et parois, sur les instabilités et sur la turbulence.

Plasmas pour la production d’énergie

Filière magnétique. Le projet international ITER pour l’utilisation de la FCM (Fusion par Confinement Magnétique) comme source d’énergie alternative bas carbone a pour but le contrôle d’un plasma en combustion et la validation des solutions techniques pour la régénération du tritium dans les couvertures tritigènes d’un réacteur. Il suscite des recherches très diverses, souvent fondamentales.

Ces activités de recherche pluridisciplinaires sur la FCM sont coordonnées au niveau national par la FR-FCM (CNRS, CEA, INRIA, Ecole Polytechnique et une quarantaine d’universités, écoles et instituts), qui est structurée en thématiques, correspondant aux grands enjeux du programme sur la fusion.

La physique de la turbulence et de la dynamique non-linéaire, des processus atomiques, des surfaces est au cœur des deux premières missions de la feuille de route européenne : 1) optimiser les régimes d’opération en minimisant les pertes. Les points-clés sont la maîtrise des disruptions (pertes brutales de confinement, point faible du tokamak) et des scénarios stationnaires, l’alimentation du plasma en carburant, le pompage des cendres de réaction, et la maîtrise de la contamination par les impuretés érodées de la paroi ; 2) optimiser les paramètres du plasma et les matériaux de paroi pour supporter les forts flux de chaleur et de particules produits dans un plasma en combustion. Ce problème provient d’un trop bon confinement du plasma dans les zones périphériques, ce qui focalise l’énergie s’échappant du plasma sur une portion très localisée de la paroi.

L’étude de la physique des plasmas chauds confinés au centre des machines de FCM met en jeu la stabilité MHD (Magnéto-Hydro-Dynamique) macroscopique de la décharge, les phénomènes de transport turbulent dégradant le confinement, et le transport d’impuretés vers le cœur du plasma, où elles rayonnent de l’énergie thermique. Dans ces plasmas peu collisionnels, les approches cinétiques jouent un rôle clé notamment pour modéliser la turbulence plasma, les particules suprathermiques engendrées par des systèmes de chauffage externes ou les particules alpha de fusion. Ceci se traduit par des approches hybrides cinétique/fluide pour l’effet des particules rapides sur la stabilité non linéaire MHD, et des approches gyrocinétiques (cinétique avec moyenne sur les girations des particules autour des lignes de champ magnétique) pour la turbulence.

L’étude du transport et de la turbulence dans les plasmas de bord se focalise sur l’étude de la compatibilité des décharges plasma avec la paroi matérielle, du point de vue du plasma. Il s’agit d’étudier les contraintes imposées par le plasma sur la paroi. Les enjeux scientifiques sont liés aux phénomènes de transport turbulent dans ces régions, ainsi que sur les instabilités MHD spécifiques aux régions périphériques du plasma confiné (Edge Localized Modes). Y interviennent les mécanismes de physique atomique et moléculaire qui permettent d’étaler la puissance sortant du plasma confiné sur une surface plus importante.

Les activités sur les interactions plasma-paroi, en lien avec la physique des surfaces et des matériaux, veulent répondre aux grandes questions concernant la tenue au flux de chaleur, l’érosion des matériaux par le plasma, ainsi qu’à leur interaction avec les isotopes de l’hydrogène et d’autres espèces présentes dans le plasma. La rétention du tritium (quantité de tritium piégée dans la paroi) est essentielle du point de vue de la sureté nucléaire. Elle a conduit à remplacer le carbone des parois par du tungstène, ce qui a fortement impacté les études dans ce domaine. Les études multi-échelles (calculs DFT d’énergies de piégeages, modèles de cinétique de population de pièges) et basées sur des expériences de laboratoire se sont fortement développées. Un autre aspect important des activités est lié aux modifications de la morphologie de surface induite par l’action de l’hélium sur le tungstène (nano-bulles, nano-structures…).

Les activités de modélisation évoluent vers une intégration dans une hiérarchie de modèles de niveaux de fidélité croissants. Outre l’importance de pouvoir traiter le même problème avec des outils différents, intégrer des modèles extrêmement complexes dans les modèles réduits, possiblement en utilisant l’intelligence artificielle devient nécessaire. Il est également indispensable de maintenir un effort de validation poussé, s’appuyant sur des systèmes de mesure performants via des expériences dédiées.

Filière inertielle. En 2013, de réelles avancées dans la compréhension des mécanismes physiques qui préviennent l’obtention d’un gain significatif en attaque directe (instabilités paramétriques, absorption de l’énergie laser, conversion X, instabilités hydrodynamiques, etc.) ont été réalisées et des résultats ont démontré un chauffage significatif du combustible par les particules alpha, et donc une amorce du processus d’allumage.

L’attaque directe connaît, en parallèle, un regain d’intérêt dû au nouveau schéma d’allumage par choc, schéma alternatif d’allumage pour contourner les principaux obstacles de l’approche conventionnelle. Il repose sur la séparation des phases de compression et d’allumage et un dépôt d’énergie additionnel sur un temps très bref, dû à un choc fort. Ce schéma, qui semble réalisable avec les technologies laser actuelles, mobilise plusieurs équipes en France, en Europe et aux Etats-Unis afin de prouver sa faisabilité sur les installations NIF et LMJ-PETAL.

Une campagne dédiée à l’étude du schéma d’allumage par choc est en cours, avec une deuxième partie prévue ultérieurement qui pourra bénéficier de l’implantation de nouveaux diagnostics. Il s’agit de mesurer la propagation d’un choc fort dans un milieu pré-comprimé et préchauffé en présence ou non d’un flux important d’électrons suprathermiques. Il est à noter que ces expériences ont été programmées grâce à des études préliminaires réalisées sur des installations laser « intermédiaires » en France, en Grande-Bretagne ou au Japon, où l’objectif final ne pouvait être atteint par manque d’énergie disponible.

L’ouverture à la communauté scientifique des installations LMJ-PETAL donne accès à des installations avec des performances bien supérieures à celles des installations disponibles auparavant, alliant les capacités expérimentales étendues du LMJ à un vaste champ d’expériences rendu possible par la haute puissance du faisceau PW. L’ALP (Association Lasers et Plasmas) assure l’accès de la communauté scientifique aux installations lasers de puissance LMJ-PETAL, et contribue au développement de la recherche auprès des grands lasers nationaux et internationaux. Ses actions sont en lien étroit avec les quatre GDR qui animent cette communauté scientifique.

La présence de forts champs magnétiques auto-générés dans les plasmas de FCI et la possibilité d’améliorer les performances des implosions en magnétisant les cibles ont relancé les activités de recherche expérimentales, théoriques et numériques sur les plasmas fortement magnétisés. Une expérience dédiée à l’étude de l’interaction entre champ magnétique et transport thermique dans les conditions de la FCI a permis de démontrer la reconnexion magnétique dans une configuration de plasma créé par laser ainsi que l’obtention de champs magnétiques beaucoup plus intenses (proches du kT) qu’avec des installations de plus basse énergie. Cela a également permis de sonder le phénomène de reconnexion magnétique dans un régime proche de celui des arches solaires.

Etats extrêmes de la matière et haute densité d’énergie

Depuis une vingtaine d’années, l’ILP (Institut Laser Plasma) coordonnait les recherches et développements liés aux lasers et plasmas. L’ILP comprenait l’ALP qui gérait l’accès aux installations laser du CEA/DAM (LMJ-PETAL) et la FLP (Fédération de Recherche Lasers et Plasmas) qui animait la communauté. En 2018, ces activités se sont réorganisées en quatre GDR complémentaires – UP, LEPICE-HDE, APPEL (Accélérateurs Plasma Pompés par Laser) et ACO- CHOCOLAS (Action Concertée pour l’Etude des Matériaux sous très grandes Vitesses de Déformations), dans lesquels on retrouve les thèmes de la HDE (Haute Densité d’Energie) et de l’UHI (Ultra-Haute Intensité).

L’évolution des installations expérimentales est à l’origine de progrès significatifs en physique des HDE créés par laser et autres sources de rayonnements secondaires. La synergie provient notamment de l’ouverture du LMJ-PETAL à la communauté académique avec la réalisation des premières expériences, du X-FEL européen de Hambourg inauguré en 2017 avec une ligne dédiée aux expériences HDE permettant aux utilisateurs d’apporter des instruments et des outils de diagnostic, de l’ouverture future du HPLF (High Power Laser Facility) sur le site de l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) de Grenoble, des deux premières campagnes prévues sur le laser APOLLON dans le mode de 1PW-20fs et des améliorations apportées aux installations déjà opérationnelles comme LULI2000.

Ces lasers de forte énergie permettent désormais de créer en laboratoire des conditions rencontrées dans l’univers (supernovæ, disques d’accrétion, jets, etc.) et de réaliser des études dynamiques. Une forte activité se développe autour des expériences d’hydrodynamique turbulente dans les plasmas HDE. Dans ce cadre, des progrès importants ont été faits avec des expériences d’instabilité hydrodynamique de type Rayleigh-Taylor dans le régime turbulent. Ces résultats sont importants dans le contexte de la FCI (Fusion par Confinement Inertiel) et pour l’astrophysique, et nécessitent d’être poursuivis sur une installation laser de la classe mégajoule.

Les installations XFEL ont ouvert un nouveau champ d’investigation pour la HDE, car couplées à des lasers énergétiques ou des aimants pulsés. Elles vont permettre des études de la matière dans des conditions extrêmes de pression, température ou champ. De telles situations se rencontrent à l’intérieur des exo-planètes, en matière solide sous haute pression, ou dans les transitions de phases structurelles de solides complexes en présence de champs magnétiques élevés.

Des unités impliquées dans les GDR LEPICE, ACO-CHOCOLAS et le GDRI XFEL-Science, vont installer, grâce à un financement par le CNRS, un VISAR (Velocity Interferometer System for Any Reflector) à double longueur d’onde et un spectromètre permettant d’effectuer des mesures XANES (X-ray Absorption Near-Edge Structure) sur la ligne HED de l’XFEL européen dans le cadre du projet « Accessing microscopic and macroscopic electronic properties of matter under extreme conditions ».

Les sources de rayonnement secondaire sont quant à elles devenues pertinentes comme outils de diagnostic de la matière en condition extrême ou pour détecter des champs lors de l’interaction laser plasma. Citons la proton-radiographie qui utilise les protons générés sur les installations laser de classe TW et PW (LMJ-PETAL ou APOLLON par exemple). Ces protons sont extraits en face arrière d’une feuille attaquée par le laser ultra-intense. L’efficacité de la production de protons dépend de la conversion de l’énergie laser en électrons énergétiques lors de l’interaction des impulsions laser avec des plasmas très denses. En particulier, pour comprendre l’impact des surfaces structurées à l’interface laser-plasma sur l’efficacité de la conversion, des études expérimentales, théoriques et numériques ont été menées par plusieurs groupes en France.

Des lasers femto-seconde de puissance avec la technique Chirped Pulse Amplification permettent aujourd’hui de délivrer des intensités lumineuses gigantesques (1021 W/cm2), soit des champs électriques de l’ordre de 1013 V/m. Dans de telles conditions, le champ laser peut accélérer les particules chargées du plasma à des vitesses relativistes en quelques attosecondes. La physique UHI associée à ces nouveaux régimes est ultra- relativiste, fortement non-linéaire et hors-équilibre. Son étude est particulièrement motivante d’un point de vue fondamental. Les lasers PW actuels capables de délivrer des intensités supérieures à 1022 W/cm2 devraient permettre la création de conditions de champs extrêmes dans des plasmas relativistes autorisant l’observation d’effets d’électrodynamique quantique, comme la production de paires électron- positron par effet Breit-Wheeler.

Sources secondaires de particules et de rayonnement

L’accélération de particules suivant l’interaction d’un laser de haute intensité avec un gaz ou un solide suscite un intérêt grandissant. Avec la capacité d’accélération de dizaines à des centaines de GV/m, il est aujourd’hui possible de générer dans des plasmas de longueurs inferieures à 10 cm, des protons avec des charges importantes de dizaines de MeV ou des électrons de quelques GeV.

Ces sources de protons de faible émittance, qui ont un spectre large et une durée de quelques picosecondes, ont permis des applications dans le domaine médical, par exemple pour la mort cellulaire en radiothérapie. On étudie aujourd’hui les effets du fractionnement du débit de dose sur des cellules cancéreuses irradiées par protons accélérés par laser.

L’accélération d’électrons relativistes est un domaine très dynamique et compétitif. On note ces dernières d’années une transition vers une recherche plus technologique et un développement des accélérateurs pour les applications : les USA projettent la construction d’un accélérateur d’électrons de 10 GeV, la Chine et l’Allemagne investissent massivement dans ce domaine pour en prendre le leadership. Ces projets se construisent dans de grands centres et participent à la constitution d’une communauté de scientifiques experts de ces machines laser-plasma.

Des avancées sur le sillage laser pour l’accélération des électrons ont été réalisées, allant de la démonstration de nouvelles techniques d’injection d’électrons à l’augmentation de la charge accélérée. Un enjeu actuel est le contrôle de la qualité des faisceaux d’électrons obtenus et leur fiabilisation, avant de pouvoir passer à une montée en énergie des électrons ou à leur utilisation pour des applications.

Une voie prometteuse est l’accélération laser-plasma d’électrons à très haut taux de répétition. La récente réalisation d’une source d’électrons relativistes à 5 MeV à cadence du kilohertz a ouvert la voie. Elle a permis de sonder la dynamique structurale d’un échantillon de silicium à des temps courts. Ces travaux motivent aujourd’hui d’autres projets et attirent des industriels pour des applications en radiothérapie à haut débit de dose par exemple.

Des progrès ont également été réalisés sur les sources bêtatron issues de l’accélération laser-plasma. La source de rayons X aux propriétés singulières (brièveté, collimation et taille de source micrométrique) a récemment permis les premières expériences d’absorption X femtoseconde d’un échantillon de cuivre hors-équilibre.

La démonstration d’un premier FEL utilisant une source d’électrons laser-plasma déclenche une vive compétition et de forts investissements à l’international. Récemment, les premières études ont permis de mettre en place l’instrumentation nécessaire pour l’observation d’un gain FEL, les projets en cours envisagent d’aller au-delà, pour démontrer la faisabilité d’un FEL laser-plasma à longueur d’onde variable.

La recherche sur les sources de rayonnement XUV par génération d’harmoniques d’ordre élevé est un domaine en essor avec une concurrence internationale intense. Réalisée en phase gazeuse, elle vise à comprendre et contrôler la dynamique de rediffusion d’un électron par le cœur ionique en présence de champ intense. Elle ouvre des pistes vers de nouvelles spectroscopies. En milieu solide, la génération d’harmoniques vise la réalisation de sources attosecondes compactes, qui seront adaptées pour la nano-plasmonique ou l’optoélectronique pétahertz.

Les sources lasers XUV par amplification d’harmoniques dans les plasma-laser sont aujourd’hui très performantes dans la gamme (8-40 nm). Les résultats récents ont montré que ces sources intenses peuvent être d’excellente qualité optique et de polarisation contrôlée. Ces sources, même moins performantes que les XFEL, sont néanmoins une approche complémentaire et à moindre coût pour des expériences d’imagerie et d’optique non-linéaire en régime du mono-coup.

Annexe

Unités rattachées à la section 04

• CELIA : Centre Lasers intenses et Applications, Talence
• GSMA : Groupe de Spectrométrie Moléculaire et Atmosphérique, Reims
• ICB : Laboratoire Interdisciplinaire Carnot de Bourgogne, Dijon
• ILM : Institut Lumière Matière, Villeurbanne
• InPhyNi : Institut de Physique de Nice, Nice
• ISMO : Institut des Sciences Moléculaires d’Orsay, Orsay
• JEIP : Jeunes équipes de l’Institut de Physique du Collège de France, Paris
• LAC : Laboratoire Aimé Cotton, Orsay
• LCAR :LaboratoireCollisions,Agrégats, Réactivité, Toulouse
• LKB : Laboratoire Kastler-Brossel, Paris
• LOA : Laboratoire d’Optique Appliquée, Palaiseau
• LOB : Laboratoire d’Optique et Biosciences, Palaiseau
• LOMA : Laboratoire Ondes et Matière d’Aquitaine, Talence
• LP2N :LaboratoirePhotonique,Numérique, Nanosciences, Talence
• LPL : Laboratoire de Physique des Lasers, Villetaneuse
• LPP : Laboratoire de Physique des Plasmas, Palaiseau
• LULI : Laboratoire pour l’Utilisation des Lasers Intenses, Palaiseau
• PhLAM : Physique des lasers, atomes et molécules, Villeneuve d’Asq
• PIIM : Physique des Interactions Ioniques et Moléculaires, Marseille
• LIDYL : Laboratoire Interactions, Dynamiques et Lasers, Gif sur Yvette
• MajuLab, Singapour

GDR rattachés à la section 04 en secondaire

• APPEL : Accélérateurs Plasma Pompés par Laser (IN2P3)
• CHIRAFUN : Chiralité et multifonctionnalité (INC)
• COMPLEXE : Contrôle des ondes en milieu complexe (INP)
• HPERO : Pérovskites halogénées (INP)
• ImaBio : Imagerie et microscopie en biologie (INSIS)
• MESO : Physique quantique mésoscopique (INP)
• MCM-2 : MagnétismeetCommutation Moléculaires (INC)
• NACRE : Nanocristaux dans les diélectriques pour l’électronique et pour l’optique
• NBODY : Problème quantique à N corps en chimie et physique (INP)
• Ondes (INSIS)
• Ondes gravitationnelles (IN2P3)
• Or-Nano : L’or nanométrique (INP)
• Plasmonique active (INC)
• RESANET : Réactions, Structure et Astrophysique Nucléaire : Expériences et Théories (IN2P3)
• REST : Rencontres de spectroscopie théorique (INP)
• RFCT : Réseau Français de Chimie Théorique (INC)
• SUIE (INSU)

Notes

(1) http://bilansocial.dsi.cnrs.fr/

(2) Livret global_FIM_CH 2017_SECTION

(3) https://inp.cnrs.fr/sites/institut_inp/files/download-file/GDR%20INP%202019.pdf

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