Rapport de conjoncture 2019

CID 52 Environnements sociétés : du fondamental à l'opérationnel

Composition de la Commission

Catherine Leblanc (présidente de Commission) ; Enguerran Macia (secrétaire scientifique) ; Luc Abbadie ; Vincent Bels ; David Biron ; Sophie Caillon ; Marie Charpentier ; Étienne Cossart ; Étienne Deloule ; Élise Demeulenaere ; Herve Doreau, Magali Dreyfus ; Bernard Dussoubs ; Didier Galop ; Romain Garcier ; Alain Queffelec ; Ginette Saracco ; Télesphore Sime-Ngando ; Thierry Tatoni ; Konstantinos Termentzidis.

Résumé

À l’heure du changement climatique et de la crise de la biodiversité, les recherches dans le domaine de l’environnement sont devenues cruciales. Considérant la notion d’environnement comme intrinsèquement dynamique et englobante, la commission interdisciplinaire « Environnements sociétés : du fondamental à l’opérationnel » (CID 52) propose ici une vision synthétique des thématiques développées dans ce champ. Fondées sur la mise en œuvre de l’interdisciplinarité (et sa variabilité, inhérente à chaque objet d’étude), ces recherches s’articulent autour de trois piliers : l’analyse de la complexité structurelle et fonctionnelle des socio-écosystèmes ; une interaction forte avec la société ; l’innovation au service de la gestion et la préservation de l’environnement sensu largo. Forte d’une dizaine d’années d’existence, la CID 52 a pu constater le dynamisme de ce champ de recherche ainsi que son exemplarité en termes de croisement des savoirs. Maintenir et renforcer ces recherches aux interfaces constitue une priorité dans le contexte actuel et doit bénéficier d’un soutien à la hauteur des enjeux.

Introduction

La commission interdisciplinaire « Environnements sociétés : du fondamental à l’opérationnel », ou CID 52, a été créée en 2012. En prenant la suite de la CID 45 « Dynamique des systèmes environnementaux, développement durable, santé et société » (2008 – 2011), la CID 52 a poursuivi son investissement en faveur de la recherche interdisciplinaire à l’interface entre environnement et sociétés.

Dans un premier temps, il semble essentiel de rappeler la lecture que nous faisons de l’environnement au sein de la CID 52, qui rassemble des scientifiques d’horizons très divers, allant des sciences de la vie et de la terre aux sciences humaines et sociales. L’environnement, pris au sens large, est une notion intrinsèquement dynamique, temporellement comme spatialement, englobant l’ensemble du vivant (et donc, de fait, les sociétés humaines). Pour la CID 52, l’environnement se caractérise par les trois propriétés suivantes :

– des changements de qualité du milieu de vie (physique, chimique, biologique, écologique et social) ;

– des changements, liés aux activités humaines, impactant le fonctionnement des écosystèmes, des socio-écosystèmes (incluant les sociétés humaines et non-humaines) ;

– des perspectives de conservation et/ou de remédiation environnementale.

Découlant de cette acception, les fondements de la recherche en environnement s’inscrivent dans des démarches scientifiques visant :

(i) l’exploration, l’analyse et la compréhension de la complexité des systèmes écologiques et de leur fonctionnement, mais aussi des ressorts socio-politiques sous-jacents aux questions environnementales et leurs articulations ;

(ii) la sensibilisation et/ou l’implication d’autres publics que la seule communauté de recherche d’origine des chercheur.e.s à ces problématiques de recherche : chercheur.e.s d’autres disciplines, société civile organisée, décideurs politiques, « grand public » ;

(iii) la proposition de solutions, d’innovations conceptuelles, technologiques, ou socio-politiques pour la gestion et la préservation de l’environnement sensu largo.

Si les projets scientifiques entrant dans le champ de la CID 52 peuvent ne pas intégrer ces trois volets, ils doivent s’ancrer dans une problématique environnementale et s’inscrire, de façon directe ou indirecte, dans des perspectives de conservation, d’action ou de remédiation. La CID 52 couvre en effet des domaines de recherche très divers, qui se déploient à différentes échelles de temps et d’espace, sur un continuum allant de questionnements fondamentaux ou théoriques à des recherches résolument tournées vers l’opérationnel.

L’autre pierre angulaire de la CID 52 est la mise en œuvre de l’interdisciplinarité dans les pratiques de recherche. C’est en effet une approche propice pour aborder de façon novatrice la complexité des problématiques environnementales. L’interdisciplinarité est régulièrement discutée au sein de la CID 52 car sa mise en œuvre dans le champ environnemental nécessite des ajustements continus. Elle se fonde sur l’application de méthodes disciplinaires à des champs de recherche extérieurs à cette discipline, sur la combinaison de données issues des sciences de la terre, de la nature et de la société (quantitatives et qualitatives), de regards et méthodes venues de disciplines différentes pour saisir un même objet de recherche. Elle peut aboutir aussi à des formes plus radicales d’interpénétration des concepts, des savoirs et des méthodes. L’interdisciplinarité telle que nous l’envisageons ouvre le champ des possibles en permettant des innovations scientifiques, à la fois sur le plan conceptuel et méthodologique, et un ancrage dans l’opérationnalité. Dans ce contexte, la CID est particulièrement attentive aux démarches de recherche originales sur l’environnement, qui ne trouvent pas toujours de place dans les sections disciplinaires.

I. Les thématiques scientifiques au cœur de la CID 52 et leur évolution

Dans cette première partie, les grandes thématiques scientifiques de la CID 52 sont regroupées en trois chapitres distincts, construits autour des mots-clés qui définissent les contours de la commission. D’autres thèmes plus transverses irriguent également l’ensemble, tels que l’écologie de la santé ou l’écologie globale.

A. Changements planétaires et transition écologique

1. Changements planétaires

L’histoire de la Terre montre que le changement est une des propriétés fondamentales de la Planète, qu’il soit lié à des causes internes telles que la convection mantellique, la tectonique des plaques ou les éruptions volcaniques majeures, ou à des causes externes telles que les impacts de météorites, l’activité solaire ou la position de la terre par rapport au soleil. Ces changements, qui peuvent affecter la Terre en profondeur, se traduisent par une évolution permanente du climat, des grands cycles biogéochimiques et des conditions de vie à la surface de la planète, auxquelles se sont adaptés les organismes vivants au cours de l’évolution. Ce qui est cependant nouveau, c’est l’ampleur et la vitesse de ce changement. C’est aussi son origine, quasi exclusivement humaine, au point de constituer pour beaucoup de chercheur.e.s une période géologique nouvelle : l’Anthropocène. Au point également de remettre en cause les équilibres environnementaux et la trajectoire de développement économique et sociale dominante et de poser, dans l’urgence, le défi de la construction d’alternatives écologiquement durables et socialement responsables.

Même si certaines composantes du changement sont identifiées depuis longtemps, voire quantifiées, il demeure un important travail d’observation, d’analyses et de modélisation à accomplir pour préciser leur dynamique et leur évolution, les régionaliser et en réduire les incertitudes – points cruciaux pour l’identification de phénomènes d’adaptation et/ou la mise au point de stratégies pertinentes d’atténuation. C’est dans ce cadre que sont menés de nombreux travaux sur la chimie de l’atmosphère, le climat, l’usage des terres ou les stratégies énergétiques. D’autres composantes sont aujourd’hui mal connues, comme les cycles biogéochimiques des polluants métalliques, organiques (dont les perturbateurs endocriniens) ou autres polluants issus de rejets anthropiques (plastique par exemple). Il existe un grand besoin de quantification et d’identification des effets des perturbations environnementales sur la dynamique et la santé des organismes et des écosystèmes, notamment dans des environnements concentrant une forte densité de population humaine (zones urbaines, milieux marins côtiers, etc.). De vastes territoires restent encore à explorer, tels que les océans, les zones de transition (continuum terre-mer, montagnes, etc.). La question des réponses, de l’adaptation et de l’évolution de ces écosystèmes aux forçages anthropiques, climatiques et chimiques reste ouverte. Au-delà des gains de connaissances que l’on peut attendre des recherches qui seront menées sur ces aspects, ces thématiques interrogent notre capacité à caractériser des trajectoires, identifier des solutions (concepts de « science based » et/ou « nature-based » solutions) et formaliser des modes de gestion environnementale ou de développement alternatifs qui émergeront d’expérimentations concrètes.

Certains des changements physiques, chimiques et biologiques planétaires en cours sont initiés ou déterminés par les changements sociaux et ont un impact fort sur ces derniers. Expliciter les liens entre les diverses catégories de changements est aujourd’hui un enjeu scientifique majeur. Le maintien d’un effort de recherche conséquent sur les composantes du changement environnemental demeure une exigence forte, qui doit passer par le développement d’une science des socio-écosystèmes. L’enjeu se situe au niveau des connaissances bien entendu, mais aussi au niveau opérationnel. Deux grandes directions semblent à suivre. D’une part il conviendrait de renforcer la recherche sur la dynamique des pratiques et des valeurs socio-écologiques qui régissent les interactions entre les populations humaines et les écosystèmes dans lesquels elles évoluent, notamment en ce qui concerne les ressources énergétiques, alimentaires et matérielles, mais aussi culturelles. Il y a là nécessité de favoriser les approches comparatives, dans l’espace et dans le temps, de groupes socio-culturels variés et d’écosystèmes contrastés, afin de mieux documenter l’impact des modes de vie de chacun sur l’environnement physique, la biodiversité, l’évolution et le fonctionnement des écosystèmes (mais également l’inverse). Comment ces changements modifient-ils les sociétés humaines et leur fonctionnement ? Comment ces sociétés les prennent-elles en compte dans leurs systèmes de valeurs, leurs savoirs et leurs pratiques ? D’autre part, le développement d’une écologie intégrative, globale, qui traite des interactions entre les grandes crises, et qui intègre tous les composants fonctionnels des écosystèmes est indispensable. En ce domaine, il existe encore un déficit criant de connaissances sur les rétroactions de la biodiversité et du fonctionnement des écosystèmes sur le changement climatique.

En somme, analyser les problèmes d’environnement revient à démêler la logique et les dynamiques de la complexité ; agir sur l’environnement, c’est intervenir sur cette même complexité. La science de la complexité socio-écosystémique a besoin d’outils puissants de modélisation en tant qu’outils d’exploration théorique, de simulation des systèmes écologiques et environnementaux, et de prédiction et de scénarisation de trajectoires ; ces derniers présentant également une grande valeur en matière d’aide à la décision. Ces approches en modélisation ne pourront cependant pas s’affranchir d’une recherche active de terrain sur le long terme, avec des regards disciplinaires croisés, ancrés dans les sciences de l’environnement, et des approches innovantes pouvant impliquer aussi des non-scientifiques (recherches et sciences participatives). Dans ce contexte, les zones ateliers (ZA) ou les Observatoires Hommes-Milieux (OHM) offrent d’excellents outils pérennes d’observation à long terme, mais aussi d’expérimentation locale. La recherche a en effet besoin d’expérimenter. Des efforts importants ont été consentis par le CNRS au cours des dernières décennies, en particulier en ce qui concerne les systèmes écologiques. La France a ainsi la capacité à se maintenir dans le peloton de tête des nations qui investissent dans l’écologie expérimentale mais cela suppose de maintenir des moyens humains techniques suffisants.

2. Transitions et stratégies de développement durable

Les sciences de l’environnement sont aujourd’hui au cœur de l’enjeu majeur du xxie siècle, celui de la transition écologique, que l’on peut résumer de la façon suivante : comment subvenir, de manière satisfaisante, aux besoins de plus de sept milliards d’êtres humains tout en respectant l’intégrité fonctionnelle des écosystèmes et leurs capacités d’adaptation et d’évolution à plus ou moins long terme ? Ces besoins s’expriment en termes d’alimentation, d’énergie, de bien-être et de sécurité, bref… de développement durable.

Dans cette perspective, de nouvelles manières de faire de la recherche doivent venir compléter le gradient d’approches existantes. Le défi consiste à veiller à l’interpénétration des résultats de la recherche en sciences de la vie et de la terre avec ceux des sciences humaines et sociales car la transition écologique ne peut dissocier l’environnement physique, chimique et biologique (et ses changements au cours du temps, dans différents lieux et à différentes échelles) des sociétés humaines. Il s’agit de maximiser l’impact des avancées scientifiques sur la construction de stratégies et d’outils de transition innovants et pertinents, construits à partir d’une vision systémique et évolutive de l’environnement et de ses composants. L’enjeu de la valorisation de la science vers l’action et l’opérationnel se joue à l’évidence sur les problématiques portées par l’ingénierie écologique, la chimie durable, l’agroécologie, le développement des énergies renouvelables, etc. Mais, à côté de ces secteurs techniques ou technologiques à fort potentiel, d’autres domaines sont en développement rapide au niveau international et ne bénéficient en France que d’un soutien insuffisant. C’est par exemple le cas des travaux en écologie politique, en économie écologique ou philosophie environnementale, mais aussi le développement des sciences participatives en tant que manifestation de l’émergence d’une (éco-)citoyenneté nouvelle, de l’éthique du vivant ou de la justice environnementale, en tant que fondements du développement durable.

B. Socio-écosystèmes, ressources naturelles et régulations

1. Socio-écosystèmes : fonctions et services, régulation et gestion, du local au global

La démarche socio-écosystémique a progressivement gagné en robustesse et en popularité depuis sa formalisation au début des années 2000. Elle repose sur quatre piliers, qui constituent autant d’entrées dans les problématiques environnementales :

– un modèle des relations sociétés-environnement, fondé sur la notion d’interactions et de rétroactions ;

– une grammaire conceptuelle articulée autour de la notion de systèmes complexes et de leurs attributs (résilience, émergence, jeux d’échelles et de temps, institutions, gouvernance, communs, etc.) ;

– des outils analytiques à la fois plastiques et puissants, provenant tant des sciences sociales que des sciences de la terre et de la nature ;

– une base pour des discussions et des recherches intrinsèquement interdisciplinaires. La diversité des origines disciplinaires de ces recherches est frappante, puisque peuvent être concernées aussi bien la géochimie, la chimie, l’écologie, la géographie, la biologie de la conservation, l’éthologie, la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, le droit, l’économie ou la philosophie.

Cette démarche socio-écosystémique a été soutenue par le CNRS, avec la création des Observatoires Hommes-Milieux (OHM), qui permettent le suivi de socio-écosystèmes sur le temps long, en intégrant différentes échelles. La CID 52, ces dernières années, a vu apparaître et se renforcer des recherches qui se réclament ouvertement des approches socio-écosystémiques ou qui ont tiré parti des ressources de recherche offertes par les OHM.

Les approches socio-écosystémiques ne constituent pas l’unique manière de concevoir l’interdisciplinarité en matière d’environnement mais elles apportent un fort potentiel d’innovation. Cette innovation peut être technique avec le développement de nouvelles méthodes de mesures ou de traitement des données, mais doit aussi être réflexive dans la manière d’appréhender le système dans sa complexité et de poser des questions sous un angle nouveau. Pour favoriser l’émergence d’innovations plurielles, il importe pour les communautés de recherche concernées :

1o de réfléchir à la structuration spatiale et aux propriétés des systèmes : sources de données, échelles, flux, circulations, seuils ;

2o de faire de la science des socio-écosystèmes une source de transformations socio-écologiques : régulation et dimension normative, approches politiques, dimension critique ;

3o d’élargir le panel des approches en sciences humaines : éthique, imaginaires, esthétique, etc. ;

4o d’impliquer les non-scientifiques dans le processus d’élaboration des projets : co-construction et démarches participatives.

2. Ressources naturelles : prospective et usages par les sociétés

L’accélération actuelle de l’usage des ressources naturelles constitue une singularité à l’échelle historique : elle est constitutive de l’entrée dans l’Anthropocène car le moteur s’en trouve moins dans la démographie que dans le mode de développement des sociétés humaines, marqué par l’expansion du capitalisme consumériste à de nouveaux espaces et à des nouvelles populations.

Du point de vue scientifique, l’analyse des ressources naturelles s’en trouve transformée. Tout d’abord, l’ampleur des phénomènes observés est sans équivalent. Tous les types de ressources sont concernés : les ressources énergétiques, minérales, vivantes, l’espace même (via l’artificialisation des sols). Deuxièmement, les chercheur.e.s mettent progressivement en évidence l’interconnexion entre l’usage des ressources, l’altération des équilibres environnementaux (effondrement de la biodiversité, destruction ou fragmentation d’habitats, migrations écologiques, maladies émergentes, imprégnation des sols, des organismes et des écosystèmes terrestres et marins par les pesticides et les polluants, etc.), et la modification des grands cycles biogéochimiques (émissions de CO2, changements climatiques, pollutions multiples). Ainsi sont apparus, dans les dernières années, de nouveaux « nexus » (water-food-energy par exemple), qui demandent à être explorés. Enfin, l’exploitation excessive des ressources pose des questions éthiques qui ne se ramènent pas simplement à une morale de la Nature mais ouvrent aussi à des questionnements critiques (post-coloniaux par exemple) sur l’usage inégal de ces ressources planétaires ou sur l’exposition différentielle aux dommages écologiques et sanitaires qui en découlent.

Dans ce contexte, la prospective de recherche ne s’oriente plus uniquement vers la question de la « protection des ressources naturelles » mais sur la compréhension des mécanismes qui gouvernent la construction et la constitution de ces ressources. Par exemple, il semble important de comprendre que les ressources naturelles échappent, elles aussi, à la division entre « nature » et « culture » : elles sont constituées en tant que telles à travers les usages humains mais n’en revêtent pas moins une part de récalcitrance et d’autonomie qui échappe à l’agir intentionnel des hommes. Il existe aussi des continuums d’usages que les travaux sur les déchets, le ré-usage, le recyclage ou sur le recyclage de l’énergie (chaleur) mettent en évidence.

C. Nature et biodiversité, écologie globale

1. Nature et biodiversité : positionnement, protection et conservation

Face aux enjeux actuels, l’effort de recherche doit être renforcé pour a) comprendre le rôle structurel et fonctionnel de la biodiversité au sein des écosystèmes et b) traduire ces connaissances en solutions visant à maintenir, protéger et réguler les systèmes socio-écologiques et les services écosystémiques. Ce champ de recherche est le lieu par excellence d’approches interdisciplinaires, entre sciences de la nature et de la terre et sciences humaines et sociales puisqu’il comprend des développements méthodologiques (suivis de terrain, indicateurs, modélisation, etc.), la compréhension fine des processus sous-jacents à différentes échelles de temps (dynamiques, interactions, résilience, etc.) et des questionnements épistémologiques et sociaux spécifiques (définition, perception, évaluation, réglementations, facteurs socio-politiques, etc.).

L’émergence de variations et de propriétés des écosystèmes sont difficilement perceptibles par une unique quantification de la diversité biologique, mais découlent à la fois d’une capacité adaptative des organismes vivants et d’un héritage historique complexe, sur des durées de temps parfois très longues, notamment au sein d’écosystèmes anthropisés. Les projections et scénarisations de la réponse environnementale doivent par exemple intégrer la possibilité d’adaptation des organismes à de nouvelles niches écologiques. Ainsi, les concepts et approches empruntés à la biologie évolutive, comme science prédictive, prennent tout leur sens dans l’étude des effets des changements globaux sur, par exemple, la biodiversité. Le caractère prédictif de la biologie évolutive a notamment permis de comprendre des processus comme l’évolution des résistances aux antibiotiques en médecine humaine et vétérinaire, ou aux pesticides en agronomie.

Dans le contexte d’interactions anciennes entre les sociétés humaines et la nature, il convient de questionner la notion de « naturalité », qui intègre l’être humain comme élément de la nature, mais reste perçue par les uns comme l’antinomie de l’artificialisation et par d’autres comme la garantie d’une expression « naturelle » des processus écologiques. Les modes de gestion (agricole, forestière, marine) et les politiques de conservation doivent être analysés, pour comprendre comment cette « naturalité » s’est construite et maintenue dans le temps. Définir des objectifs de conservation renvoie en effet à mieux intégrer les trajectoires des dynamiques écologiques et leur impact sur les sociétés humaines et le fonctionnement des écosystèmes. C’est dans ce contexte que des projets de recherche en paléoenvironnement, en histoire de l’environnement ou en philosophie environnementale, par exemple, ont une place en CID 52 : ils intègrent l’étude des dynamiques environnementales du passé (en série plus ou moins longue, à partir de sources multiples, issues des sciences naturelles, sociales ou humaines) pour comprendre le présent et questionner l’avenir. Quels sont les seuils d’intervention au-delà desquelles l’artificialisation des milieux est irréversible ? Pour quels services écosystémiques, avec quelle biodiversité et selon quelle trajectoire écologique ? Quelle nature voulons-nous ? Ces questions sont au cœur de la CID 52. Les rétroactions de la nature sur les populations humaines le sont également, comme la manière dont ces dernières vont intégrer les éléments de la nature dans leurs ontologies, leurs schèmes de pensées, leurs systèmes de connaissances et leurs pratiques.

Les efforts visant à concilier la conservation de la nature et le développement humain impliquent donc l’intégration des sciences sociales et humaines dans la biologie de la conservation et l’incorporation des acteurs locaux (par exemple, membres des communautés, ONG, gouvernement local) dans la recherche, la gestion communautaire ou la conservation in situ de la biodiversité. Des stratégies de conservation équitables demandent (1) de prendre en compte la diversité des connaissances écologiques (y compris les systèmes de classification), des pratiques et des systèmes de représentations culturelles ; (2) d’aller au-delà de la dichotomie entre les humains et la nature en reconnaissant les interrelations entre les sociétés (humaines, animales) et leur environnement ; (3) d’analyser les processus de transformation et d’évolution de ces interactions.

Plus particulièrement, la prise en compte de la relation mutualiste entre les peuples autochtones, les communautés locales (animales, végétales, microbiennes) et l’environnement n’exclut pas les mesures scientifiques et la surveillance des états, processus, interactions et fonctions des écosystèmes. Les savoirs locaux et les savoirs scientifiques, notamment en écologie des communautés, partagent des concepts comme la connectivité et la parenté, aspects spécifiquement reconnus comme une préoccupation centrale de la conservation. La co-construction de projets de recherche, s’appuyant sur une interdisciplinarité de terrain et l’intersubjectivité des acteurs, doit faciliter la mise en œuvre d’actions de préservation de l’environnement.

2. Écologie globale

Comme évoqué précédemment, l’écologie globale est un champ scientifique qui irrigue nombre de recherches soutenues par la CID 52. Cette notion amène en effet à penser l’environnement de manière systémique et fonctionnelle, afin d’aborder les questions scientifiques dans toute leur complexité, à différentes échelles de temps et d’espace. Ceci est nécessaire pour contourner des visions trop sectorielles pouvant conduire à des perceptions faussées, ou du moins à des interprétations partielles, des processus à l’œuvre. L’écologie globale affiche des objectifs de développement durable et opérationnels en proposant des résultats mobilisables, notamment dans l’aménagement du territoire, la gestion des ressources naturelles et la protection des écosystèmes. Elle a pour objectif d’identifier et d’intégrer les paramètres écologiques, biogéochimiques, physiques, sociaux (et leur évolution) au sein d’une approche holistique, afin de mieux appréhender et anticiper les risques environnementaux et leurs conséquences, mais aussi de poser les bases d’une gestion durable des ressources et des systèmes socio-écologiques pour, in fine, contribuer à la préservation de la biodiversité et à l’amélioration des conditions de vie des sociétés humaines et animales.

En se focalisant sur les systèmes socio-écologiques et les processus dynamiques qui les concernent, les développements fondamentaux associés au champ de l’écologie globale et la pertinence de ses applications dépendent étroitement de la prise en compte de l’hétérogénéité des sources de données, des échelles d’études et des systèmes étudiés. C’est pourquoi, dans le contexte actuel, il est indispensable de rapprocher scientifiques de divers origines, gestionnaires et décideurs, dans une approche transdisciplinaire, pour développer les « outils » et des méthodes permettant d’appréhender les systèmes complexes qui caractérisent les principaux enjeux socio-environnementaux. D’un point de vue pratique, il parait important de renforcer les échanges entre les communautés scientifiques et les recherches aux interfaces (éco-anthropologie ou ethno-écologie, éco-chimie, éco-physique, éco-mathématiques, etc.). C’est dans ce contexte que les initiatives structurantes (GDR, IRN, OHM ou ZA par exemple) permettent de mobiliser des communautés interdisciplinaires autour de thèmes (pollinisation, médiation chimique, invasions biologiques, pollution des sols et des cours d’eau, zoonoses, etc.) en lien avec les rôles des écosystèmes et la gestion et l’aménagement des territoires urbains, ruraux et ultra-marins.

D. Thèmes émergents, pratiques nouvelles

1. Nouvelles approches pour appréhender l’environnement

Les recherches environnementales intègrent de nouvelles visions et perceptions de la nature. De nouvelles approches émergent, se nourrissant de disciplines encore peu mobilisées dans le champ environnemental ou s’appropriant des techniques jusqu’alors réservées à d’autres champs de recherche. Ainsi les recherches sur la « nature » en ville (écologie urbaine) se multiplient et gomment les frontières disciplinaires habituelles, intégrant par exemple la psychologie environnementale.

Le développement des techniques de séquençage à haut débit (métagénomique) appliquées à l’environnement a permis d’accéder aux composantes microscopiques des organismes ou des écosystèmes, et révélé une complexité jusqu’alors invisible : les organismes macroscopiques forment une entité fonctionnelle avec leur microbiote. Dans un contexte de changements des milieux de vie, le concept d’holobionte questionne ainsi les pratiques de conservation, l’adaptation des écosystèmes aux changements, les relations santé-environnement, et ouvre parallèlement des questions éthiques, juridiques et philosophiques.

L’application de techniques à haute résolution et à haut débit (chimie, traçages isotopiques, métabolomique, métagénomique, etc.) aux suivis environnementaux accompagne l’essor de nouvelles thématiques de recherche en lien avec la santé des sociétés et des écosystèmes, passés et présents (exposome, perturbateurs, nanopolluants, alimentation, communication chimique, etc.). L’intégration des données issues de sources multiples recoupe le défi actuel de la gestion et l’analyse des « big data », créant des interfaces entre les sciences de l’environnement et les mathématiques, l’informatique ou les sciences de l’information. La préservation et la mise à disposition des données multiples, et très hétérogènes, qui permettent de décrire la complexité environnementale demande de plus un effort particulier dans la création de banques de données inter opérationnelles, avant de pouvoir arriver au statut d’open data réclamé par les tutelles.

2. Écologie de la santé

L’écologie de la santé constitue un champ de recherche émergent s’intéressant aux liens entre l’environnement et la santé des populations et des écosystèmes, qu’elles soient humaines, animales ou végétales ; du passé comme du présent. Si l’écologie de la santé s’applique à la vie dans son ensemble – et constitue donc une approche volontairement englobante –, les perturbations climatiques dues aux activités humaines, la crise actuelle de la biodiversité, l’émergence de nouvelles épidémies, voire la réémergence de certaines autres, et la prise en compte d’expositions multiples (concept d’exposome, pollutions) rendent cette approche holistique particulièrement pertinente dans le contexte contemporain. Alors que les approches de type « One Health » en écologie se sont d’abord focalisées sur la lutte contre l’émergence des zoonoses, la prise en compte des écosystèmes et de leurs composantes biotiques et abiotiques devient maintenant centrale en écologie de la santé. Ainsi, des approches favorisant l’étude de l’interdépendance, la coexistence et l’évolution des êtres vivants et de leur environnement, lui-même en pleine mutation, paraissent aujourd’hui essentielles. Cela concerne, par exemple, les recherches en épidémiologie écologique et évolutive, en éco-toxicologie, sur la santé en milieu urbain ou sur le rôle des microbiotes et de leur déséquilibre (notion de « dysbiose »). La prise en compte des différentes composantes de la biodiversité, du stress physiologique des populations et des modifications d’habitats, est aussi nécessaire pour obtenir une vision globale du fonctionnement des écosystèmes. Un enjeu majeur est donc aujourd’hui de franchir les frontières qui séparent la médecine humaine et vétérinaire des sciences de l’écologie, de l’évolution et de l’environnement. La triade « environnement-santé-sociétés » constitue le socle sur lequel repose toute approche en écologie de la santé. Ainsi située aux frontières des sciences de l’environnement, des sciences biomédicales et des sciences humaines et sociales, l’écologie de la santé constitue un champ de recherche interdisciplinaire ouvrant de nouvelles voies pour améliorer la santé des espèces vivantes sur une planète, elle aussi, en danger.

3. Humanités environnementales

Ces dernières années ont vu l’arrivée et l’essor dans la recherche francophone du label « Humanités environnementales », traduction littérale de environmental humanities. Ce label, auquel certains ont préféré celui plus classique d’« études environnementales » (traduction de environmental studies, que les anglophones distinguent des environmental sciences ancrées en sciences biophysiques), traduit la structuration d’un champ de recherche interdisciplinaire sur l’environnement, au croisement de l’écologie et de plusieurs disciplines des sciences humaines et sociales, parmi lesquelles on citera la philosophie, l’anthropologie, la géographie, la sociologie, l’économie, les sciences politiques, les études littéraires… Ce mouvement s’inscrit dans une temporalité plus longue des sciences humaines et sociales. Celles-ci ont été marquées dans les années 1970 par les approches matérialistes issues du marxisme ; puis dans les années 1990 par l’hégémonie du constructivisme social (l’idée que le monde et les catégories pour le penser sont socialement construits). À partir du milieu des années 2000, la crise écologique planétaire s’imposant, il est apparu que les approches constructivistes avaient eu tendance à occulter la dimension matérielle des existences, et qu’il convenait de renouveler l’attention sur celles-ci. Ce nouveau matérialisme s’accompagne de revendications épistémologiques fortes, de dépassement du sociocentrisme supposé fondateur des sciences humaines et sociales, à travers des collaborations étroites avec les sciences de la nature, de la terre et des matériaux. On peut noter que des champs de recherche interdisciplinaires déjà anciens, mais restés marginaux dans leur discipline d’appartenance, se voient dans ce nouveau contexte parés du statut de pionniers : citons l’« économie écologique » qui, par contraste avec l’économie de l’environnement, cherche à intégrer les dynamiques écologiques dans la compréhension des logiques d’appropriation et d’exploitation des ressources naturelles ; citons également l’histoire environnementale qui se nourrit non seulement des sources classiques des historiens, mais aussi des sources inscrites dans l’environnement.

4. Recherches et sciences participatives

La dernière décennie a été marquée par un engouement pour les approches dites « participatives » en recherche, et plus particulièrement dans le domaine de l’environnement. La « co-construction » avec les populations locales s’est imposée au cours des années 1970-1980 comme la meilleure façon d’augmenter tant la légitimité démocratique que l’efficacité des projets de développement et de conservation. L’enrôlement des acteurs locaux dans les projets participatifs se décline sur un gradient qui va de la simple consultation à l’intégration de leurs logiques et revendications. Ces approches offrent des cadres flexibles en intégrant les connexions – y compris les convergences et les divergences – entre les savoirs locaux et scientifiques. Des dynamiques plus politiques ont aussi pesé dans les arènes internationales de gouvernance de l’environnement qui – du Sommet de la Terre à Rio en 1992 à la création de l’IPBES – ont accordé une place officielle aux savoirs autochtones. Par ailleurs, les zones d’incertitude qu’ouvrent les dynamiques environnementales (qu’il s’agisse du risque technologique ou du fonctionnement des écosystèmes dans un contexte de changement global) ont remis en question les conceptions classiques de l’expertise. À partir des années 1990, il est apparu que la production d’expertises sur des problèmes complexes devait s’appuyer non seulement sur une multiplicité de paradigmes disciplinaires mais aussi inclure les perspectives d’acteurs non scientifiques. Enfin, le besoin de réaliser des suivis de l’état de l’environnement, associé aux progrès de la statistique et aux possibilités ouvertes par le numérique et les big data, ont contribué au formidable essor des « sciences participatives » (citizen sciences en anglais) reposant sur la contribution massive de contributeurs bénévoles à des projets dirigés par des scientifiques. La conjonction de ces dynamiques a favorisé la contribution croissante de publics non académiques dans la production d’expertises et de savoirs environnementaux.

Nous sommes désormais dans une période de soutien institutionnel à la recherche participative qui renouvelle la posture et les activités des chercheur.e.s. Ceux-ci ne sont plus considérés comme ayant le monopole du savoir, mais deviennent experts parmi d’autres. Dans le domaine environnemental, certains chercheur.e.s se forgent une compétence dans la conception ou l’animation de dispositifs scientifiques visant l’intégration de savoirs multiples ; d’autres maintiennent une démarche plus analytique, visant à élucider les incommensurabilités entre ces formes de savoirs et les frictions que leur rencontre génère (cette dernière ligne de recherche se trouvant à l’intersection entre les CID 52 et CID 53).

II. Forces, opportunités et angles morts de la recherche environnementale

A. Bilan pluriannuel (UMR, chercheur.e.s, recrutements)

1. Présentation chiffrée des contours de la CID 52

Actuellement, la CID 52 est une section secondaire d’évaluation de 69 unités de recherche (UMR, UMI, UMS, USR et FR) et en charge de 11 Zones Ateliers (ZA). Elle est également sollicitée pour donner un avis scientifique sur des écoles thématiques et des groupements de recherche (GDR).

83 chercheur.e.s CNRS sont rattaché.e.s en section secondaire à la CID 52, dont 42 CR (40 CRCN, 2 CRCH) et 41 DR (39 DR2, 2 DR1). Ils se répartissent dans 56 unités au niveau national : la grande majorité (39 unités) n’héberge qu’un.e seul.e chercheur.e rattaché.e à la CID 52, 12 unités en hébergent deux. Les 5 dernières unités en comptent respectivement 3, 4 et 6.

La répartition des chercheur.e.s évalué.e.s par la CID 52, selon les Instituts et les sections principales de rattachement, est présentée dans la figure ci-contre. La majorité (44 chercheur.e.s, soit 53 %) travaille dans une unité rattachée principalement à l’INEE, alors que 18 et 11 chercheur.e.s sont dans des laboratoires dépendants de l’INSHS et l’INSU, respectivement. La dizaine d’autres chercheur.e.s appartient à des unités rattachées à l’INSIS, l’INSB, l’INC et l’INS2I et l’IN2P3. Les sections disciplinaires concernées sont, par ordre décroissant, les sections 30, 29, 39, 31, 37, 38, 19 et 40 avec, respectivement, 17, 15, 11, 10, 7, 6, 5 et 4 chercheur.e.s de la CID 52.

Distribution des effectifs de chercheur.e.s, rattaché.e.s à la CID 52, selon l’institut de rattachement de leur unité d’affectation (haut) ou de leur section disciplinaire principale (bas).

2. Historique et bilan des recrutements de chercheur.e.s

Un bilan a été réalisé sur la période 2008-2019 afin d’avoir une vision d’ensemble des recrutements interdisciplinaires dans le domaine « environnement, sociétés » depuis 10 ans. Ce bilan est donc le reflet du travail de trois commissions : la CID 45 de 2008 à 2011, puis la CID 52 de 2012 à 2015, et la commission actuelle qui siège depuis 2017.

Pendant la période 2008-2019 (les chiffres pour la période 2012-2019, correspondant à la CID 52, sont indiqués entre parenthèses), sur les 60 (30) chargé.e.s de recherche (45 % de femmes, CR2, CR1 et CRCN confondus) recruté.e.s au CNRS, 36 (17) ont été affecté.e.s dans des unités de recherche rattachées principalement à l’INEE, 19 (7) à l’INSHS et 5 (4) à l’INSU. Deux autres chercheur.e.s recruté.e.s en CID 45 ont été affecté.e.s à des laboratoires de l’IN2P3 et l’INS2I. À la suite de leur recrutement, ces chargé.e.s de recherche ont demandé leur rattachement principal à une section disciplinaire, les CID étant des sections secondaires d’évaluation. Les sections concernées sont par ordre décroissant : la section 29 avec 14 (4) CRCN, la section 31 avec 12 (6) CRCN, la section 30 avec 10 (3) CRCN, la section 39 avec 8 (6) CRCN, la section 19 et la section 38 avec 5 (3 et 5) CRCN chacune, la section 35 avec 3 (0) CRCN, les sections 36, 37 et 40 avec 1 CRCN chacune, recruté depuis 2012.

Pour la même période, il y a eu 43 (21) recrutements de DR2 en CID 45 puis CID 52, dont 37,2 % de femmes promues. 23 (17) de ces lauréat.e.s ont été affecté.e.s dans des laboratoires rattachés principalement à l’INEE, alors que 12 (7) DR2 travaillent dans des unités rattachées à l’INSHS et 3 DR2 ont été recruté.e.s dans des laboratoires de l’INSU depuis 2012. Par ailleurs, un.e DR2 a été rattaché.e à un laboratoire de l’INC, l’INS2I, l’INSB, l’IN2P3 et l’INSIS. Les sections disciplinaires de rattachement principal des DR2 promu.e.s sont par ordre décroissant : la section 30 avec 11 (9) DR2, la section 29 avec 8 (6) DR2, la section 37 avec 7 (3) DR2, la section 31 avec 4 (4) DR2, les sections 39 et 40 avec 3 (3) et 2 (1) DR2, respectivement, et un.e seul.e DR2 rattaché.e aux sections 7, 13, 16, 19, 33, 35, 38 et 41.

Les projets de recherche des jeunes chercheur.e.s recruté.e.s depuis 10 ans se développent à l’interface de plusieurs disciplines, mettent en pratique l’interdisciplinarité, et renvoient chacun à plusieurs mots-clés de la CID 52. En résumé, les grandes thématiques abordées se focalisent sur les changements planétaires et les interactions biosphère-atmosphère ; les liens entre environnement, santé et sociétés ; les relations homme-nature ; l’économie de la santé ; les stratégies de développement durable. Une majorité de jeunes chercheur.e.s recruté.e.s s’inscrivent en écologie de la santé, en écologie globale, en écologie chimique et éco-toxicologie, en génétique et génomique évolutive et environnementale, en paléo-écologie et paléo-environnement, en bio- et géo-archéologie. Les thématiques de recherche développées par les DR sont sensiblement les mêmes, auxquelles s’ajoutent les relations entre ressources naturelles et santé, les questions de dynamique spatiale et de territoire, les changements planétaires, à l’interface entre écologie et mathématiques.

B. Analyse SWOT

Les éléments qui suivent sont issus d’une réflexion menée au sein de la CID 52. Celle-ci n’a pas vocation à dresser un schéma exhaustif du paysage actuel, mais a pour but de souligner quelques éléments essentiels de la recherche interdisciplinaire à l’interface entre environnement et sociétés.

1. Forces

Les relations entre l’environnement et la société constituent un sujet politique, social et scientifique majeur à l’heure du changement climatique et de la crise de la biodiversité. La sensibilisation des populations à ces questions médiatisées est indéniable. La presse écrite, comme radiophonique et télévisuelle, ne cesse de nous rappeler l’absolue nécessité de lutter contre ces perturbations environnementales, qui impactent en retour nos conditions d’existence. Dans ce contexte, le vivier de jeunes chercheur.e.s s’intéressant à l’environnement – qu’ils viennent directement de l’écologie ou qu’ils soient issus d’autres filières disciplinaires – est immense. Cette masse critique constitue un des points forts de la CID 52, où la pression du concours fait partie des plus importantes. Au cours de ces trois dernières années, la CID 52 a en effet noté une augmentation significative du nombre de candidatures au concours de chargé.e de recherche (de 42,3 à 47,5 candidatures par poste entre 2017 et 2019). Elle a pu aussi constater que de très nombreux jeunes chercheur.e.s ont développé une approche interdisciplinaire dès leur doctorat. Cette interdisciplinarité peut se situer à l’intérieur de grands champs scientifiques comme à leur interface, mais est toujours révélatrice d’une curiosité et d’une ouverture bénéfiques à la démarche scientifique, qui ne saurait produire de résultats véritablement pertinents en se coupant des autres domaines du savoir. Ces profils d’interdisciplinarité « avérée » – que ce soit au travers de publications, de collaborations ou de projets en cours – ont été reconnus et valorisés par la CID 52, qui a conscience des difficultés qu’il existe à dépasser l’hyperspécialisation des savoirs (par ailleurs nécessaire). D’autant plus à un stade précoce de sa carrière scientifique.

Les recherches portant sur les liens entre environnement et sociétés ont également l’avantage de pouvoir être publiées dans une multitude de supports. Elles intéressent aussi bien les revues spécialisées sur ces interactions (Environnemental Ethics, NSS, Ecology & Society, Conservation & society, etc.) que les revues généralistes (Nature, Science, PLOS ONE, etc.) et les revues disciplinaires soucieuses de mettre l’accent sur les questions d’environnement. Dans le contexte des perturbations environnementales affectant l’ensemble du monde vivant, le domaine de publications relevant de la CID 52 ne pourra que s’accroître dans les années à venir, donnant toujours plus de visibilité aux travaux interdisciplinaires entre environnement et sociétés.

Après des années de valorisation institutionnelle (et officielle) de l’interdisciplinarité, il apparaît que les recherches croisant différents domaines du savoir commencent à être mieux acceptées, et publiées, qu’auparavant. Les éditeurs, comme les bailleurs de fonds, semblent avoir progressivement pris conscience de l’apport des travaux menés aux interfaces et permettant de dépasser les paradigmes disciplinaires. Le potentiel de rupture inhérent aux démarches interdisciplinaires est désormais reconnu et encouragé, mais aussi considéré (à juste titre) comme une véritable nécessité pour faire avancer les savoirs vers des directions encore inconnues.

Les interactions entre environnement et sociétés sont au cœur de nombreuses structures opérationnelles, à tous les niveaux. Le GIEC et ses groupes de travail, comme l’IPBES, en constituent probablement les exemples les plus fameux au niveau international. Plus modestes et moins médiatisées, des structures de recherche comme les OHM et les ZA permettent de produire les résultats sur lesquels les grandes instances internationales peuvent s’appuyer pour la rédaction de leurs rapports. L’interaction entre ces différents niveaux est indispensable pour l’avancée des savoirs dans le domaine de l’environnement et montre à quel point les « débouchés » peuvent y être nombreux à l’heure du changement climatique.

2. Faiblesses

Un des risques majeurs dans le domaine de l’environnement, comme d’ailleurs dans tout champ de recherche, réside dans le maintien d’une « science normale », s’appuyant toujours sur les mêmes paradigmes et, par conséquent, sans potentiel de ruptures. Si l’interdisciplinarité semble au premier abord se poser en rempart contre ce risque en demandant aux scientifiques qui la pratiquent de toujours remettre en cause (et redéfinir) leurs paradigmes, il faut rester vigilant face aux discours concernant l’interdisciplinarité, qui ne saurait être à l’abri de leur propre redondance et autres effets de mode. La CID 52 est par conséquent particulièrement attentive à la pertinence de l’interdisciplinarité mise en œuvre, qui ne saurait regrouper l’ensemble des savoirs, sur l’ensemble des objets d’étude environnementaux. Par exemple, si les approches théoriques de modélisation sont indispensables aux problématiques environnementales, les données mobilisées et les simplifications inhérentes à la démarche doivent (souvent) être éclaircies pour « faire sens ».

Par ailleurs, une attention particulière doit être portée au vocabulaire employé par les grandes institutions internationales et les médias. La migration des concepts scientifiques vers le grand public se déroule avec des transformations, des interprétations ou des raccourcis qu’il s’agit de scruter pour éviter tout amalgame entre les résultats de la science et les usages qui peuvent en être faits.

3. Opportunités

La thématique de l’environnement s’impose comme une thématique d’avenir, qu’il s’agit de construire dès à présent. Ce contexte, lié à l’urgence de la situation environnementale, constitue une opportunité exceptionnelle pour les profils interdisciplinaires œuvrant dans le domaine de l’environnement.

Cependant, si la crise climatique et les perturbations environnementales, dans leur ensemble, mettent l’accent sur le rôle des scientifiques dans la lutte contre le changement climatique et la transition écologique, après trois années de concours, la CID 52 a constaté que peu de projets étaient inscrits en sciences politiques de l’environnement. Si tous les autres domaines semblent actuellement représentés, cette approche est aujourd’hui la grande absente des thématiques environnementales observées en CID 52.

Par ailleurs, l’évolution actuelle des formations universitaires et de la formation par la recherche montre que l’interdisciplinarité s’ancre fortement dans les filières axées sur les sciences environnementales et le développement durable, qui connaissent un engouement notable.

4. Menaces

Bien entendu, la plus grande menace pour la recherche interdisciplinaire dans le domaine de l’environnement réside dans la réduction du budget alloué à la recherche en général. Elle impacte directement la CID 52, comme les autres sections du CNRS. Cependant, la recherche interdisciplinaire nécessitant, par définition même, de s’étendre sur un temps plus long, avec des risques plus importants, le risque de la voir dévalorisée au profit d’approches avec des rendus plus immédiats est grande. Il est donc nécessaire de prendre en considération ces particularismes de l’interdisciplinarité pour que la recherche aux interfaces perdure et engendre les ruptures que l’on attend d’elle.

Dans une période de restriction budgétaire et de diminution du nombre de postes permanents ouverts au concours, le danger est latent de voir un repliement de certaines disciplines sur leur cœur de métier, ce qui favoriserait le recrutement de chercheur.e.s disciplinaires au détriment de l’interdisciplinarité. Comme l’indique l’analyse de la répartition des chercheur.e.s de la CID 52, la grande majorité appartient à des laboratoires qui ne comptent qu’un seul chercheur en CID 52. Un faible nombre de chercheur.e.s interdisciplinaires recruté.e.s au sein des unités de recherche pourrait constituer un risque d’isolement pour ceux-ci à moyen et long terme. Ils peuvent cependant jouer un rôle clé, localement, en favorisant les projets collaboratifs entre les différentes unités d’un même site.

Enfin l’utilisation de l’anglais reste incontournable dans les productions scientifiques. Néanmoins, nous attirons l’attention sur la menace que constitue actuellement une standardisation excessive des publications et sur le piège d’une évaluation quantitative se limitant à des indices de citation ou de facteurs d’impacts. La globalisation implique la mise en commun d’une multitude de cultures scientifiques. L’utilisation exclusive de l’anglais peut être à l’origine d’un appauvrissement des concepts et des notions sous-tendant les propos des chercheur.e.s, notamment en sciences humaines et sociales. Des travaux linguistiquement inscrits dans leur contexte constituent d’ailleurs des opportunités pour la création d’écoles de pensées susceptibles d’être par la suite traduites dans d’autres langues. De même, le format des articles scientifiques publiés dans des revues à comité de lecture peut parfois constituer un carcan dont les chercheur.e.s doivent s’extraire pour développer et argumenter leur propos. Les ouvrages scientifiques constituent alors des alternatives valorisées. En somme, dans le cas d’une commission interdisciplinaire, le rayonnement international des chercheur.e.s doit être évalué dans ce contexte de globalisation, en tenant compte du multilinguisme et de la diversité des cultures scientifiques.

III. Organisation et nouvelles pratiques de recherche

A. Organisation de la recherche interdisciplinaire

La CID 52 a pu constater que la pratique de l’interdisciplinarité est déjà à l’œuvre dans de nombreux laboratoires de recherche orientés vers les problématiques environnementales. Certes, le nombre d’unités ayant demandé leur rattachement à la CID 52 reste encore modeste, mais la diversité de ces laboratoires augmente parallèlement au nombre de jeunes chercheur.e.s recruté.e.s. Il est souhaitable de renforcer l’ancrage de ces pratiques interdisciplinaires au sein des laboratoires par l’accueil d’un nombre minimal de chercheur.e.s interdisciplinaires car la recherche interdisciplinaire nécessite une masse critique pour s’épanouir sur le long terme.

Les UMR, comme les UMI, constituent le plus souvent des structures de recherche où l’interdisciplinarité (entre disciplines d’un même grand domaine de recherche ou entre domaines) est mise en œuvre et valorisée, que ce soit entre membres d’une même équipe ou entre équipes. Cette organisation en laboratoires et en équipes est à même de favoriser les interactions nécessaires à l’interdisciplinarité et à l’émergence de nouvelles approches. Le regroupement des petites unités de recherche en plus gros laboratoires semble en ce sens constituer une opportunité pour le développement des approches interdisciplinaires. Localement, les Zones Ateliers et les Observatoires Hommes-Milieux sont des structures dédiées à ces approches interdisciplinaires, et à même de les fédérer sur des territoires délimités. Par ailleurs, à l’heure de la globalisation, d’autres formes de structuration doivent être renforcées pour faciliter le développement de thématiques émergentes et favoriser les démarches interdisciplinaires aux échelles nationale et internationale. Ainsi, les FRE, les GDR, les IRN (ex-GDRI) ou encore les LIA pourraient bénéficier de davantage de soutien. Ces structures transversales sont nécessaires au dialogue entre chercheur.e.s issus d’univers différents mais travaillant sur des objets communs. Leur nombre et leur durée pourraient être augmentés car l’interdisciplinarité est chronophage et nécessite des interactions récurrentes pour prendre forme.

B. Interactions avec la société

Les recherches en environnement ne peuvent pas être déconnectées des enjeux sociétaux. Les interactions sont telles que nous devons désormais assumer, appréhender et développer la notion d’interdépendance entre l’humain et le non-humain, entre les dynamiques de la biodiversité et le développement harmonieux des sociétés humaines, entre les problématiques environnementales, le bien-être humain et la préservation des milieux de vie.

Dans ce contexte, la production d’articles scientifiques, destinée à valoriser les résultats ou confronter des hypothèses au sein d’une communauté de spécialistes, ne peut plus être le seul objectif, mais doit constituer une étape avant d’envisager un véritable transfert vers les décideurs, gestionnaires, aménageurs et l’ensemble de la société civile. Maintenant plus que jamais, et en particulier dans le domaine des sciences de l’environnement, il est devenu urgent de connecter les connaissances fondamentales à l’opérationnel par l’innovation dans la valorisation, la réalisation de la transversalité et par le développement de méthodologies de transferts.

Une voie d’innovation se situe au niveau des collaborations entre les espaces naturels protégés, notamment les Parc Naturels Régionaux, les Parcs Nationaux et les Réserves de biosphère, qui peuvent constituer des territoires d’expérimentation particulièrement pertinents et représenter une offre partenariale riche, aussi bien pour l’accompagnement des travaux de recherche que pour la médiation des résultats vers le grand public, les techniciens et les élus.

Du fait de la complexité des systèmes socio-écologiques, structurés par des interactions diversifiées et dynamiques, la recherche n’est plus en situation de fournir des experts en tant que tels. En revanche, elle propose des groupes de chercheur.e.s interdisciplinaires pour étudier cette complexité et envisager, de manière collective et collaborative, les voies d’un développement plus durable visant à amoindrir les effets de la crise socio-environnementale sur les ressources naturelles et les productions agricoles ou sur des écosystèmes sensibles. Des projets de recherche, en connexion étroite avec les populations locales, sont ainsi conduits au sein des ZA et des OHM, qui embrassent une grande diversité de terrains d’études, de zones urbaines, bassins versants, à des territoires impactés par des pollutions, en passant par des zones d’élevage en Afrique de l’Ouest

L’impact de la recherche en environnement sur la société et les rétroactions qui en découlent passe nécessairement par un investissement significatif dans les processus de communication et les différents média. Paradoxalement, ce sont encore trop souvent des non spécialistes qui communiquent sur les grands enjeux environnementaux ou les questions écologiques. La faible présence médiatique de chercheur.e.s spécialisé.e.s dans l’étude de la complexité socio-environnementale constitue sans doute un frein dans la prise de conscience et la compréhension globale des véritables enjeux du xxie siècle et des orientations politiques qui doivent être prises.

Une autre manière de rendre les recherches environnementales accessibles au-delà des milieux académiques réside dans les interactions avec le monde artistique (art environnemental ou écologique). Dans ce domaine émergent, des chercheur.e.s expérimentent des formes novatrices d’écriture et de restitution (recours aux films, à la création multimédia…) en intégrant le processus de création artistique. Cette ouverture aux formes sensibles de restitution du savoir apparaît tout à fait pertinente compte tenu des enjeux de la crise écologique. Elle est compatible de surcroît avec les injonctions institutionnelles de décloisonnement des savoirs académiques et d’intervention des chercheur.e.s dans la cité.

C. Place et rôle du CNRS sur les problématiques environnementales

En France, le CNRS est sans doute le seul organisme permettant la mise en œuvre de l’interdisciplinarité à travers le recrutement de jeunes chercheur.e.s au sein des laboratoires. D’autres organismes comme l’IRD et le CIRAD le font également, mais en recrutant des chercheur.e.s disciplinaires dans des unités interdisciplinaires. La CID 52 joue là un rôle capital en offrant des débouchés professionnels à des jeunes chercheur.e.s au parcours original et à la démarche interdisciplinaire, comme nous le savons, risquée et chronophage.

La CID 52 est composée de scientifiques aux expertises diverses (écologues, biologistes, anthropologues (anthropologie biologique et anthropologie sociale), géographes (géographie physique et humaine), ethnoécologues, physiciens, chimistes, géochimistes, mathématiciens, juristes) tous sensibilisés et impliqués dans des démarches interdisciplinaires. Elle fait le pari de l’intelligence collective, de la mutualisation des savoirs, avec succès depuis sa création. Les regards croisés sont à même d’évaluer de manière pertinente l’interdisciplinarité des chercheur.e.s en balayant de fait un nombre non négligeable de grands champs scientifiques et d’interactions disciplinaires, permettant ainsi à des candidats issus de paradigmes épistémologiques très différents, ainsi qu’à des candidats jugés « atypiques » dans leur section d’origine, d’être évalués au plus près de leurs compétences.

Avec dix ans de recul sur les recrutements en CID 52, la diversité des sections principales de rattachement des CRCN et DR2 est le reflet des multiples formes d’interdisciplinarité rencontrées sur les problématiques environnementales actuelles, puisqu’elles couvrent quasiment l’ensemble des sections du CNRS ayant un lien avec l’environnement sensu largo. Il est fondamental de maintenir cet éventail disciplinaire, le plus large possible. Le double rattachement des chercheur.e.s, recruté.e.s et évalué.e.s par la CID 52, leur permet de garder un ancrage dans une discipline et une communauté. Il favorise également, via les échanges entre les membres des sections disciplinaires et la CID 52, la diffusion des pratiques interdisciplinaires au sein des sections. Néanmoins, certains chercheur.e.s dont les recherches sont au cœur de la CID 52 restent parfois à la marge de leur section disciplinaire de rattachement, et il serait alors souhaitable de considérer la CID 52 comme une section principale d’évaluation. La CID 52 déplore aussi qu’elle ne puisse suivre l’évolution des carrières de jeunes chercheur.e.s recruté.e.s, ou suite à une promotion DR2, en émettant des avis sur les avancements de grades CRCN/ CRCH, DR2/ DR1.

Avec les ZA et les OHM, le CNRS dispose également de dispositifs d’observation et d’expérimentation performants des socio-écosystèmes, malheureusement encore trop peu dotés en termes de moyens financiers et humains. L’enjeu est pourtant immense puisqu’il s’agit, ni plus ni moins, de maintenir les suivis à long terme des paramètres environnementaux tout en renforçant l’observation simultanée des composantes humaines et sociales du socio-écosystème (enquêtes, suivi de cohortes, etc.). Le retour d’expériences des OHM, et du LabEx DRIIHM (Dispositif de Recherche Interdisciplinaire sur les Interactions Hommes-Milieux) qui les rassemblent, permet de souligner que les approches socio-écosystémiques nécessitent une certaine durée pour s’établir : les résultats les plus probants sont parus une dizaine d’années après le lancement des dispositifs de recherche, temps nécessaire pour que les collectifs se créent et se connaissent, et que le suivi longitudinal des variations socio-environnementales donne ses premiers résultats.

Conclusion

Les problématiques environnementales nécessitent d’être abordées dans leur globalité. De fait, seule l’hybridation de disciplines issues des sciences de la terre, de la vie et de la société permettent la prise en compte de leur complexité, à la fois physique, chimique, biologique, écologique, humaine et sociale, par des approches quantitatives et qualitatives et à différentes échelles spatio-temporelles. Au cours des dernières années, les profils très variés des jeunes chercheur.e.s recruté.e.s en CID 52, ainsi que leurs laboratoires d’affectations, montrent que ce croisement des disciplines opère avec succès. Maintenir, et même renforcer, ces recrutements aux profils interdisciplinaires est maintenant crucial, tout comme pérenniser les moyens et outils mis en place par le CNRS pour soutenir des recherches à l’interface entre environnement et sociétés. Ces recherches ne sont pas exemptes de prises de risques, au contraire, s’inscrivent parfois sur un temps long, et conduisent souvent à sortir des sentiers battus pour réellement innover. Elles ont l’ambition et la capacité d’être à l’origine d’une innovation globale, pour tous, sur tous les fronts des savoirs et des connaissances.

Alors que la prise de conscience des changements en cours se généralise, et que l’impératif de la transition écologique s’impose, la fracture s’accroît entre d’un côté une recherche de pointe, de plus en plus spécialisée, et de l’autre côté une société amenée à prendre des décisions collégiales sur des enjeux cruciaux. La pratique de l’interdisciplinarité et sa diffusion au sein des communautés scientifiques (et même au-delà), tout comme la mise en œuvre de recherches participatives, contribuent à combler ce gouffre. S’appuyer sur la pluralité des expertises et sur l’intelligence collective est devenu une nécessité pour répondre aux questions environnementales contemporaines. Face à l’urgence de la situation, la recherche publique, au service du bien commun, doit bénéficier d’un soutien à la hauteur des enjeux.